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Truvada en prévention

VIH : la PrEP utile parmi les migrants africains et caraibéens

Par Audrey Vaugrente

Le recours au Truvada en prévention d'une infection par le VIH peut être élargi aux populations africaines et caribéennes. Sensibles à ce thème, elles voient cette stratégie d'un bon oeil.

NIAID/Flickr
Le Truvada en PrEP à la demande réduit de 86 % le risque d’infection chez les HSH en moyenne.
35 à 49 % des migrants africains suivis pour VIH ont été contaminés après leur arrivée en France.
En 2013, 31 % des nouveaux diagnostics de VIH concernaient une personne née en Afrique subsaharienne.
La PrEP est autorisée depuis le 4 janvier 2016. Le Truvada bénéficie depuis le 21 février 2017 d'une autorisation de mise sur le marché dans cette indication.
Les personnes hétérosexuelles nées en Afrique subsaharienne ou vivant en Guyane peuvent en bénéficier au cas par cas.

Voilà plus d’un an que le Truvada est autorisé en prévention d’une infection par le VIH. La prophylaxie pré-exposition (PrEP), nom de cette stratégie, n’atteint pourtant pas l’ensemble de sa cible. 3 000 personnes ont déjà consulté un service hospitalier pour recevoir le traitement. Mais la quasi-totalité d’entre elles (98 %) sont des hommes qui ont des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH).

Si les HSH sont la première population à risque, d’autres catégories sont très exposées au VIH. C’est le cas des personnes originaires de l’Afrique ou des Caraïbes. Les autorités sanitaires leur offrent la possibilité de recevoir le Truvada en prévention, au cas par cas. Cette stratégie aurait tout intérêt à se développer au sein de cette population, selon une étude parue dans le Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH) édité par Santé Publique France. Non seulement l’approche est techniquement faisable, mais elle réduirait en plus le nombre de contaminations.

Trois situations à risque

Sur le papier, le bénéfice du Truvada est clair : pris en fonction des rapports à risque, il réduit de 86 % le risque de transmission du VIH. Une efficacité qui peut grimper à 99 % lorsque la prise est totalement respectée. Mais qu’en est-il chez les populations hétérosexuelles africaines et caribéennes ? La réponse est apportée par cette enquête réalisée par le milieu associatif.

Les personnes interrogées identifient trois principales situations à risque. La première concerne les rapports occasionnels non protégés, provoqués par la difficulté avouée d’utiliser des préservatifs. « Le risque se mesure à la bonne mine du partenaire », illustrent les auteurs du BEH. Quitte à invoquer la protection divine...

Mais le couple n’est pas épargné : en guise de preuve de confiance, il n’est pas rare que le préservatif soit abandonné… sans réaliser au préalable un dépistage. De même, un époux volage soulève un problème épineux ; malgré le doute le préservatif est difficile à imposer. « Les femmes dont le mari ‘triche dehors’ souhaiteraient prendre le médicament le temps que la confiance revienne dans le couple », souligne l’enquête. Par défaut, le dépistage est utilisé a posteriori pour se rassurer en vérifiant qu’on n’est pas contaminé.



Quelques doutes

« Au final, tout le monde est à haut risque » et pourrait bénéficier de la PrEP, concluent les auteurs de ce BEH. Aux yeux des personnes interrogées, la stratégie présente alors un double avantage : se protéger soi-même, et protéger son partenaire. L’approche est d’autant plus acceptable que la prise en charge relève de la collectivité.

Mais acceptation ne signifie pas confiance aveugle. Les populations africaines et caribéennes estiment que la prescription limitée aux médecins hospitaliers est un problème. « Cela peut laisser penser que cette stratégie n’en est qu’à l’étape de test » et l’hôpital est symbole de maladie, soulignent les auteurs. L’élargissement de la prescription aux Centres de diagnostic et dépistage (CeGIDD) pourrait lever les résistances.


La consommation d’une simple pilule soulève aussi le doute de la part des personnes interrogées. « On arrive à créer une pilule pour prévenir l’infection mais on n’arrive pas à créer un vaccin pour guérir de la maladie ? » interroge ainsi un participant. Sans compter le risque associé aux oublis, que signalent de nombreuses femmes.

Malgré ces doutes, le Truvada en prévention a bien sa place dans une population à haut risque. Au milieu associatif revient le rôle de lutter contre les préjugés et de rassurer les personnes concernées par la PrEP. La stratégie serait d’autant plus efficace que ces populations sont déjà bien sensibilisées aux risques liés au VIH. Un dispositif à compléter par une offre plus large de prévention.