C'est ce qui s'appelle taper du poing sur la table. Dans un communiqué publié ce jeudi, Marisol Touraine, ministre de la Santé, annonce approuver l'arbitrage de Bertrand Fragonard. Celui-ci met en œuvre les nouveaux tarifs et plafonds relatifs aux soins dentaires.
La philosophie du texte a pour objectif de développer la prévention et réduire le reste à charge des patients. Pour y arriver, le gouvernement va plafonner le tarif des prothèses et augmenter la base de remboursement des couronnes, actes prothétiques les plus courants (de 107,5 euros à 120 euros en 2019).
La locataire de l'avenue Duquesne par en effet du constat suivant : « le financement actuel de la chirurgie dentaire n’incite pas à la réalisation d’actes de prévention et favorise la pratique de dépassements tarifaires sur les prothèses dentaires ».
Contre le renoncement aux soins
Chiffres à l'appui, elle rappelle les 25 % du coût des soins dentaires qui restent à la charge des familles et le taux de dépassement d’honoraires sur les prothèses dentaires qui a progressé de 66 points en 10 ans, pour atteindre près de 300 % en moyenne du tarif remboursé. Conséquence directe, « un Français sur cinq renonce aux soins dentaires pour des raisons financières », affirme le ministère.
Soins dentaires : concrètement, quels changements ? Des exemples ici ?https://t.co/0nwWU67ZfB #prévention #priseencharge #santé
— MinSocialSanté (@MinSocialSante) 10 mars 2017
Mais pour les chirurgiens-dentistes, ces nouveaux tarifs sont une « déclaration de guerre ». Ces professionnels de santé regrettent que les dispositions contenues dans le règlement arbitral soient en dessous des dernières propositions de l'Assurance maladie qu'ils avaient déjà rejetées... Plus exactement, il estiment que certains niveaux de tarifs proposés seront « intenables économiquement ».
La guerre des prothèses aura lieu
Ils citent notamment ceux qui concernent les bénéficiaires de la CMU-C, étendus aux ACS, soit 15 % de la population. « En valorisant de nouveaux actes sur la base des remboursements bloqués depuis 29 ans, l’arbitre et la ministre vont mettre en difficulté tous les cabinets à proportion importante de bénéficiaires de la CMU-C et ACS », juge Catherine Mojaïsky, présidente de la Confédération Nationale des Syndicats Dentaires (CNSD).
Le règlement arbitral mettra en difficulté ceux qui soignent les démunis et ne modifiera pas l'accès aux soins des autres patients.
— Mojaïsky Catherine (@chmjsk) 10 mars 2017
Le premier syndicat de la profession regrette, par ailleurs, la différenciation tarifaire départementale sur les plafonds de prothèse : « la ministre privilégie les départements franciliens à forte densité démographique et remet ainsi en cause les dispositions visant à inciter les installations dans les zones en tension démographique ». Conclusion de la dentiste de Melun (Seine-et-Marne) : « Certains actes ne pourront pas être réalisés car très inférieurs au coût de fabrication ».
Une action en justice annoncée
La CNSD n'abandonnera toutefois par la bataille et indique qu'elle combattra devant les tribunaux ce règlement arbitral dès sa promulgation. La Confédération en appelle désormais aux candidats à la présidence de la République en leur demandant de proposer « une vraie politique bucco-dentaire, respectueuse de l’équilibre économique des cabinets dentaires et permettant de garantir aux patients la sécurité, la qualité et le bénéfice de techniques innovantes, préservant la dent ». « C’est l’avenir d’une profession, de sa filière et de l’accès aux soins des patients qui est en jeu », conclut-elle.