Il ne fait pas vraiment rêver, avec ses dents allongés, ses petits yeux, sa peau nue et fripée. Et pourtant, le rat-taupe nu en sait long sur la vie. Et surtout, comment la prolonger. Ce rongeur africain peut, en effet, vivre jusqu’à 30 ans en captivité. Une longévité exceptionnelle par rapport à ses cousins. Son secret est détaillé dans la revue Physiological Reviews. L’homme pourrait en tirer profit, d’après les auteurs de cette revue de la littérature, de l’Université d’Etat de Moscou (Russie) et l’Institut Leibniz (Allemagne).
Une résistance exceptionnelle
A raison de 8 centimètres pour 35 grammes, le rat-taupe nu est pour ainsi dire un poids plume parmi les rongeurs. Une petite taille qui ne l’empêche pas de durer, puisqu’il vit jusqu’à dix fois plus longtemps qu’une souris standard. Le tout sans développer de pathologies comme les cancers, sans ride ou stérilité.
A bien y regarder, l'animal est incroyablement solide. Même avec l’âge, la mortalité de l’espèce est relativement stable. Il faut dire qu'il a plusieurs atouts dans son jeu. Son cerveau, par exemple, résiste particulièrement bien à une baisse d’oxygénation. Le mérite revient à un récepteur (GluN2D) qui, d’habitude, est peu présent chez les rongeurs adultes, mais qui persiste chez cet animal. En résulte une plus grande plasticité cérébrale.
Les rats-taupes nus sont aussi capables de résister à la douleur et de préserver l’intégrité de leurs neurones. En somme, les animaux parviennent à ralentir leur processus de développement, ce qui prolonge leur jeunesse et freine leur vieillissement.
Une méthode lente
Les auteurs de cette revue n’hésitent pas à dresser un parallèle entre le rat-taupe nu et l’être humain. De fait, l’espérance de vie de l’humanité se prolonge régulièrement depuis plusieurs millénaires. Un peu à la manière du rongeur, notre espèce a sacrifié ses poils, sa grande taille et sa structure squelettique afin d’accroître sa longévité.
Mais l’heure n’est plus à ce processus lent qu’est la sélection naturelle. « Nous, êtres humains, n’avons plus recours à l’évolution naturelle qui est une méthode très lente, souligne Vladimir Skulachev, co-auteur de l’étude. Nous utilisons les progrès techniques et scientifiques pour parvenir à nos fins. »
Les pistes se multiplient donc pour vivre toujours plus longtemps, mais surtout en bonne santé. D’après l’équipe germano-russe, l’utilisation d’antioxydants à cible mitochondriale pourrait aboutir à des résultats prometteurs. Elle cible en effet la « batterie » des cellules, qui diffère chez le rat-taupe nu.