Parfois, la réalité dépasse la fiction. Matt Damon a montré l’exemple dans Seul sur Mars, en fertilisant des pommes de terre à l’aide de ses déjections. Le scénario a visé juste. En effet, les astronautes qui se rendront sur la planète rouge auront probablement à mettre à profit leur vessie. Ce ne sont pas des patates, mais des tomates, que l’Agence spatiale allemande veut faire pousser à l’aide d’urine en partie humaine.
« Pour être très honnête, ça n’est pas la meilleure tomate que j’aie jamais mangée ; la peau est épaisse et le goût légèrement amer », témoigne le journaliste britannique Richard Hollingham, auteur d’un reportage paru sur le site de la BBC. Voilà qui ferait presque regretter les légumes fades disponibles en supermarché.
Des conditions rudes
Si la planète Mars fait rêver, les agences spatiales du monde entier ont des préoccupations bien plus terriennes à l’esprit. Comment nourrir les astronautes en mission ? La réponse est claire : une cargaison d’aliments ne suffira pas. Pour un voyage si long, les voyageurs de l’espace devront produire leur propre pitance.
L’ampleur du problème réside dans la nature de la planète rouge. La température moyenne en surface est de – 63 °C. Le sol est également soumis aux vents solaires et aux radiations spatiales. On estime que l’irradiation y est 2,5 fois plus forte qu’à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS). La pomme de terre semble capable d’y résister, tout comme la tomate.
Une interrogation majeure demeure, celle de la culture. A ce sujet, l’Agence spatiale allemande (DLR) est formelle, l’eau seule ne sera pas suffisante. Des nutriments et des bactéries doivent être présents. Deux éléments que l’urine peut fournir. Peu ragoûtant, certes, mais efficace. Les tests en laboratoire sont concluants : le liquide biologique permet de faire pousser des tomates tout à fait comestibles. Elles sont simplement un peu plus amères qu’à l’ordinaire.
Un voyage prévu dans l’espace
Concrètement, les Allemands ont élaboré une urine spécifique, en partie humaine et en partie synthétique. Cela leur permet de contrôler précisément la composition du liquide. De la pierre ponce abrite des bactéries capables de « digérer » l’urine et convertir l’ammoniaque qu’elle contient en nitrites et sels de nitrates. Voilà l’engrais.
Reste maintenant à confirmer ces résultats dans des conditions aussi proches de la vie sur Mars que possible. La NASA a lancé les recherches sur la pomme de terre dans un centre au sud du Pérou, au cœur du désert de la Pampa de la Joya, où le sol est très proche de celui de la planète rouge.
L’Agence spatiale allemande, elle, parie sur un partenariat avec Space-X. Elle prévoit de lancer un satellite peuplé de plusieurs petites serres et de 16 caméras. A 600 km d’altitude, les tomates seront soumises à une gravité lunaire, puis martienne, sous l’œil attentif des chercheurs. Elles y germeront et pousseront à l’aide d’un éclairage LED qui simulera l’alternance entre jour et nuit.
« La ligne d’arrivée est en vue, se félicite la DLR dans un communiqué paru en 2016. Le satellite et sa cargaison scientifiques décolleront à bord du Falcon 9 au deuxième semestre de 2017. » L’histoire ne dit pas qui sera chargé de goûter les tomates à leur retour sur Terre.