L’alcool fait perdre de vue la notion de risque. D’où les multiples accidents recensés chez les personnes alcoolisées dans le cadre d’une ivresse ponctuelle ou lors d’usages répétés – blessures, accidents de la route, chutes… Mais cette perception serait encore plus altérée lorsque l’alcool est mélangé à une boisson énergisante, selon une méta-analyse canadienne publiée dans la revue Journal of Studies on Alcohol and Drugs.
Les travaux ont porté sur 10 études menées entre 1981 et 2016, qui démontrent toutes une augmentation du risque de blessures lors d’une consommation d’alcool mélangé à une boisson énergisante, en comparaison à une consommation d’alcool seul. Les auteurs ont distingué les blessures non-intentionnelles (chutes, accident de la route…) des blessures intentionnelles (bagarres ou autres violences physiques).
Masquer la fatigue
« Habituellement, lorsque vous buvez de l’alcool, vous finissez par être fatigué et vous rentrez chez vous, commentent les auteurs, de l’Université de Victoria (Colombie-Britannique). Mais les boissons énergisantes, à cause de l’effet stimulant de la caféine, masquent l’état de fatigue, ce qui peut conduire à sous-estimer son niveau d’alcoolisation, à rester dehors plus longtemps, à consommer plus d’alcool et à avoir des comportements à risque ».
Selon les auteurs, les consommateurs doivent avoir conscience de la perception biaisée qu’ils développent après avoir bu ces cocktails en vogue au Canada. Les magasins qui vendent de l’alcool distribuent désormais des boissons pré-mélangées et jamais le Vodka-RedBull n’a eu autant la cote, s’alarment-ils. Une préoccupation que l’on retrouve en France chez une jeunesse friande d’ « energy drinks ».
Sensations fortes, risques accrus
Parmi les études analysées par les chercheurs, trois se sont penchées sur le lien entre la prise de risque ou la recherche de sensations fortes, et les blessures générées après un mélange alcool-boisson énergisante.
« Certains travaux suggèrent que les personnes qui ont ces traits de personnalité pourraient préférer un état d’ébriété stimulant, que l’on peut atteindre avec ces cocktails. Cette population pourrait être encore plus à risque de blessures ». De fait, des travaux précédents ont montré que ce mélange provoquait des effets similaires à de la cocaïne, consommée précisément pour ses effets stimulants.
Les auteurs n’ont toutefois pas pu calculer l’augmentation du risque lié à l’ajout de boissons énergisantes dans l’alcool, faute de données suffisamment nombreuses et robustes. La plupart des travaux faisaient état de résultats très différents, expliquent les chercheurs, étonnés par ce vide scientifique. Deux autres études seront ainsi menées afin de confirmer ces résultats.