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Il apparaît de plus en plus évident qu’un sommeil perturbé induit des troubles métaboliques.« La privation de sommeil altère la régulation du métabolisme glucidique. Elle affecte également toutes les fonctions neuro-endocriniennes, notamment celles chargées d’informer le cerveau sur les besoins énergétiques », explique Karine Spiegel, du Centre de recherche en neurosciences de Lyon, qui a mené des études expérimentales pour tenter d’identifier les mécanismes en jeu.
Dans l’une d’entre elles, 12 jeunes adultes ont été soumis à deux situations expérimentales : l’une comportant deux nuits de 4 heures, l’autre deux nuits de 10 heures. Les résultats ont montré, chez les volontaires qui ont peu dormi, une baisse de 18 % du niveau sanguin de leptine, une hormone qui transmet au cerveau la sensation de satiété, tandis que le taux de ghréline, une autre hormone qui stimule à l’inverse la faim, était en hausse de 28 %. « Ces modifications hormonales ont été associées à une augmentation de l’appétit, en particulier pour les aliments gras et sucrés », ajoute la chercheuse.
Rôle des neurones
Son équipe soupçonne également l’influence de l’orexine, un neurotransmetteur qui stimule à la fois la faim et l’état d’éveil. « Un sommeil restreint semble induire une stimulation des neurones à orexine, qui augmenterait également la prise alimentaire liée au plaisir, en stimulant les aires cérébrales dopaminergiques impliquées dans la récompense. D’où cette appétence pour les aliments très énergétiques. »
Les plus jeunes y seraient particulièrement sensibles. Selon une méta-analyse australienne, le risque de surpoids ou d’obésité est en effet multiplié par deux chez les enfants et les adolescents qui dorment peu.
1 heure qui fait la différence
Afin de vérifier si, à l’inverse, une amélioration du sommeil peut modifier la prise alimentaire, Karine Spiegel et ses collègues ont mené, plus récemment, une autre étude sur de jeunes adultes en surpoids ou obèses dormant moins de sept heures par nuit.
La moitié d’entre eux a gardé ses habitudes de sommeil, l’autre a dormi au moins une heure de plus chaque nuit. Les résultats, qui devraient être prochainement publiés, montrent que, pendant la semaine de temps de sommeil prolongé, ces jeunes sont moins tentés par les aliments gras et sucrés, et par le grignotage. Et, face au buffet à volonté qui leur a été présenté en fin d’étude, ils se sont montrés beaucoup plus raisonnables, comparativement à la semaine pendant laquelle ils n’avaient pas modifié leur sommeil.
Vincent Richeux