Peut mieux faire. En matière de santé et de sécurité routière, les candidats à l’élection présidentielle ont encore des efforts à consentir. Plusieurs experts en santé publique ont interrogé les principaux prétendants au poste suprême dans le cadre du groupe Sécurité Sanitaire. Sept d’entre eux ont répondu aux questions sur l’alcool, le tabac ou encore les médicaments.
Dans un bilan paru ce 11 avril, les spécialistes font le point sur les programmes. Pour cela, ils ont élaboré un système de notation sur 20. Le résultat est loin d’être satisfaisant. Seul Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) se distingue par un accord total avec les propositions des experts… quitte à fâcher ses électeurs.« Les divergences des positions des candidats sont éclairantes, sans parler du silence désarmant de certains », tranchent les membres du groupe.
Le prix du tabac divise
De fait, les positions des candidats à la présidence de la République sont diverses. Si Jean-Luc Mélenchon semble se démarquer par son « humanisme sans faille », ce n’est pas le cas de François Fillon (Les Républicains). Le candidat conservateur ne cède que sur deux points avancés par le groupe. Benoît Hamon (Parti Socialiste) et Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière) reprennent à leur compte 15 et 13 propositions. Les experts ne manquent pas de souligner les ambiguïtés inquiétantes du candidat Emmanuel Macron (En Marche !) et les contradictions de Marine Le Pen (Front National).
C’est sans doute dans le domaine des addictions que les positions se détachent le mieux. Une lutte efficace contre le tabagisme exige d’augmenter à 10 euros le prix du paquet de cigarettes. Emmanuel Macron semble en accord avec une telle mesure, tandis que Benoît Hamon propose d’accroître de 10 % par an les taxes visant les produits du tabac. Les candidats de droite et d’extrême-droite, eux, prônent le statu quo.
L’alcool crispe
Côté alcool aussi, la variété est de mise. Hormis Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, aucun candidat ne souhaite avertir des dangers de l’alcool, même en l’absence d’une consommation excessive. Sur ce point, Marine Le Pen joue la carte du conservatisme, puisqu’elle estime que le vin doit être pris à part... bien qu’elle souhaite revenir à l’esprit de la loi Evin de 1991. Une position paradoxale mais dans la lignée des politiques menées jusqu’ici.
Le sujet de l’alcool semble bel et bien crisper les prétendants de droite, qui ne souhaitent pas afficher les calories sur les produits alcoolisés, ou encore taxer selon les grammes d’alcool pur.
Sur le plan de l’alimentation, le bilan est un peu moins sombre. Tous les candidats s’accordent pour affirmer que le logo nutritionnel à 5 couleurs doit être adopté. Une belle union qui se brise lorsqu’il s’agit de taxer les aliments en fonction de leur qualité nutritionnelle. Cette fois, seuls les candidats de gauche donnent leur aval à une telle mesure.
Une promotion favorable
Reste une interrogation centrale, celle de la promotion des médicaments. Les membres du groupe Sécurité sanitaire jugent nécessaire d’interdire les démarchages au sein des cabinets médicaux. Sur ce point, Emmanuel Macron et François Fillon opposent un « non » ferme. Il faut dire que le secteur représente 12 000 emplois…
Mais la formation des médecins pourrait être améliorée. Le groupe suggère de réserver l’exclusivité de la formation continue (FMC) aux universités et instances conventionnelles. Là encore, les candidats En Marche ! et LR refusent une telle évolution. Ils ne souhaitent pas non plus interdire la promotion – notamment télévisée – de produits dont l’efficacité sur la santé n’est pas démontrée.
Cette position suscite la colère des experts en santé publique. « Des millions de nos concitoyens se voient vanter des produits merveilleux qui font maigrir sans effort en quelques semaines, rajeunissent votre peau, vous redonnent des forces pour éviter le burn-out », pestent-ils. Sans que rien ne soit fait pour les contredire. Ces divisions sont d'autant plus dommageables que, rassemblés, tous ces secteurs sont impliqués dans 100 000 décès prématurés par an.
La Sécurité routière à la traîne
Les réponses des candidats à la présidentielle sont plutôt médiocres sur le plan de la santé publique. Ils ne font guère mieux dans le secteur de l’insécurité routière. Interrogés sur la nécessité d’abaisser à 80 km/h la vitesse sur les routes sans glissière centrale, trois prétendants (Fillon, Le Pen, Macron) ont opposé leur refus. La représentante du Front National avance même, selon le groupe d’experts, des mesures susceptibles d’accroître la mortalité sur les routes.
Faut-il alors plus de radars mobiles ? Les candidats n’en semblent pas convaincus. Seule Marine Le Pen se contente de juger qu’il faut évaluer l’impact de chaque rada, reprenant les logiques des « points noirs » depuis longtemps abandonnée. Benoît Hamon, Marine Le Pen et Emmanuel Macron ne considèrent pas plus utile d’interdire le signalement des contrôles. « Incompréhensible », tranche le groupe d’experts.