Après un accident vasculaire cérébral (AVC), les troubles de la vision sont fréquents. Près d’un quart des victimes souffriraient d’un déficit visuel, et malheureusement peu récupéreront cette fonction faute de réadaptation efficace.
Mais une nouvelle méthode mise au point par des chercheurs de l’université de Rochester (Etats-Unis) suscite l’espoir. A l’aide d’une stimulation informatique, des patients partiellement aveugles ont réussi à atténuer leurs séquelles, rapportent-ils dans Neurology.
Ces travaux sont les premiers à montrer qu’il est possible pour des patients longuement atteints de cécité liée un AVC de récupérer un plus grand champ de vision. « Jusqu’à maintenant, les médecins pensaient qu’il n’y avait plus rien à faire », soulignent les auteurs.
Thérapie lumineuse
Mais convaincue qu’une meilleure récupération peut être effectuée, le Pr Krystel Huxlin, du centre de recherche du Flaum Eye Institute, développe une thérapie visuelle sur ordinateur. Celle-ci a pour but de réacheminer les informations visuelles vers le cerveau tout en évitant les zones cérébrales détruites par l’AVC.
Pour y arriver, la chercheuse et son équipe ont inventé un programme informatique personnalisé pour 17 patients atteints de cécité corticale (perte de vision liée à des lésions dans les cortes visuels primaires). Ce programme envoie des flash lumineux sous forme de stries et de point mobiles dans le champ non visible par les patients. Cette zone spécifique est appelée scotome négatif.
Au début de l’expérience, les patients devinaient la présence de ces tâches lumineuses qu’une fois sur deux. Mais à raison de 2 séances quotidiennes de 30 minutes pendant 3 mois, les capacités visuelles des volontaires se sont grandement améliorées. A la fin de l’étude, ils arrivaient à donner une bonne réponse 8 fois sur 10, soit autant qu’un individu sans trouble de la vision. Cette rééducation a ainsi permis de réduire le scotome négatif des patients.
L’une des participantes a notamment confié aux médecins qu’elle pouvait désormais voir les premières lettres du mot « femme » lorsqu’elle se rendait aux toilettes d’un restaurant. Les visages et les objets devenus tordus après son AVC ont repris leur forme normale.
« Les patients partent de rien et réussissent à récupérer des sensations de mouvement et visuelles – quoique insuffisantes, relève Matthew Cavanaugh, co-auteur de l’étude. Nous espérons maintenant affiner notre méthode pour que la réadaptation soit plus efficace ».
En revanche, la vision des patients n’ayant pas bénéficié de cette méthode a continué de baisser progressivement. Pour les auteurs, cela remet en cause le dogme selon lequel les troubles visuels causés par l’AVC n’évoluent plus 6 mois après l’attaque cérébral.
Le Pr Huxlin cherche à confirmer ces observations avec un plus grand groupe de patients. S’il apparaît que le déficit visuel s’empire avec les années, « ne pas rééduquer ces patients serait une véritable perte de chances », indique la chercheuse.
« Notre technique de réadaptation peut prévenir et enrayer la perte de vision après un AVC », ajoute-t-elle, précisant que, plus vite elle démarre, plus elle est efficace.