Les Français consomment trop de sel. A hauteur de 9 et 7 grammes par jour, les hommes et les femmes du pays dépassent de loin les recommandations internationales. Liée à cet excès, une maladie bien connue des Occidentaux : l’hypertension artérielle. Mais l’obésité et le diabète pourraient bien y être associés de manière plus étroite. D’après deux études parues dans le Journal of Clinical Investigation, trop de sel dans l’assiette ne déshydrate pas. Au contraire, l’organisme stocke davantage d’eau, avec un effet sur certaines hormones.
10 cosmonautes russes ont servi de cobayes aux chercheurs américains et allemands à l’origine de ces travaux. Au cours d’un programme de préparation à un voyage spatial, ces hommes ont vu leur régime alimentaire modifié à plusieurs reprises. La part de sel dans leur alimentation a atteint 12 grammes par jour. Loin de se déshydrater, l’organisme des participants a présenté une réponse pour le moins contre-intuitive.
Les muscles ou la vie
Jusqu’ici, les scientifiques considéraient que l’excès de sel provoque une excrétion massive par les urines, donc une perte d’eau proportionnelle. Au vu de ces résultats, ce n’est pas le cas. En réalité, les cosmonautes ont bu moins d’eau lorsqu’ils mangeaient trop de sel. Sans pour autant se dessécher. Cela suppose que leur corps stocke ce précieux liquide… ou qu’il en produit davantage.
Pour obtenir la réponse à cette interrogation, les chercheurs ont utilisé des souris, à qui ils ont fait subir le même régime. Leur réaction a été similaire. Mais, recherche animale oblige, l’équipe a pu entrer dans le détail. Ils ont alors constaté que l’organisme des rongeurs se place en état dit catabolique, c’est-à-dire que les muscles commencent à se dégrader. Mais pourquoi ?
Face à un excès de sel, le corps a deux solutions. La première consiste à puiser dans ses ressources. Le taux de glucocorticoïdes – hormones stéroïdiennes impliquées dans de nombreux processus – augmente. Ils dégradent les protéines musculaires pour les transformer en urée. Grâce à elle, les reins sont capables d’absorber plus d’eau, et donc d’éviter de se déshydrater lors de l’excrétion du sel.
Plus de risque de diabbète
Ce mécanisme demande beaucoup d’énergie, c’est pourquoi il puise dans les muscles. La seconde solution consiste donc à augmenter les apports alimentaires. Cela explique pourquoi, lors de la première phase, les cosmonautes ont vu leur appétit augmenter.
Les glucocorticoïdes sont souvent évoqués en diabétologie. De fait, ils sont impliqués dans le métabolisme des glucides. Des taux élevés favorisent la survenue d’un diabète ou d’une obésité. Or, l’excès de sel favorise leur augmentation. « Nos résultats suggèrent qu’un régime riche en sel peut prédisposer à un syndrome métabolique », conclut donc Jens Titze, dernier auteur de ces travaux.
Voilà qui pourrait expliquer l’épidémie d’obésité, de diabète mais aussi de maladies cardiovasculaires en cours dans les pays occidentalisés. Mieux vaut donc éviter de rajouter une pincée de sel à ses plats. Car les recommandations internationales sont claires : selon l'Organisation Mondiale de la Santé, il ne faut pas dépasser 5 grammes de sel par jour.