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CDC européen

VIH : un tiers de diagnostics tardifs chez les homosexuels

Par Audrey Vaugrente

Un pays européen sur deux affirme que la stigmatisation freine la prévention du VIH chez les hommes qui ont des rapports sexuels avec les hommes.

itakdalee/epictura

Idées reçues et stigmatisation nuisent à la santé des hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH). En matière de lutte contre le VIH plus que dans d’autres domaines. Dans un rapport spécial, le Centre européen pour le contrôle et la prévention des maladies (ECDC) pointe les retards de la prévention du VIH sur le Vieux Continent.

Les mesures engagées pour cibler cette population sont encore trop rares. Un oubli d’autant plus dommageable que les HSH représentent la population la plus touchée par le VIH. A eux seuls, ils concentrent 42 % des nouveaux diagnostics.

Des infections en hausse

Le calcul est simple. Dans tous les groupes, le nombre d’infections par le VIH recule. A une exception notable, celle des HSH. En 2006, 7 800 d’entre eux apprenaient leur séropositivité. En 2015, ils étaient plus de 9 000 à la découvrir.

La progression est indéniable, et fait de ces hommes constituent une population particulièrement vulnérable. Une approche appropriée à leurs besoins est donc nécessaire. Mais à l’heure actuelle, l’Europe n’a pas su déployer les moyens adaptés.


L’ECDC réclame, sans ambages, une action plus ferme en faveur du dépistage et des diagnostics précoces. Il faut dire que la situation est inquiétante. Alors même qu’ils sont les plus touchés par le VIH, les HSH reçoivent le diagnostic tardivement. C’est le cas pour 37 % d’entre eux.

Ce retard n’est pas sans conséquence. Une mise précoce sous traitement permet de limiter la progression du virus dans l’organisme et d’éviter les nouvelles contaminations.

Une prévention inadaptée

Les raisons de ce constat sont à la fois structurelles et sociales. 33 pays ont répondu aux interrogations de l’ECDC. Dans 20 d’entre eux, moins d’un HSH sur deux s’est fait dépister dans les 12 mois précédents. C’est beaucoup trop peu. En cause, le manque de services communautaires et de financement, ainsi que la formation inadéquate des professionnels impliqués.

Les hommes eux-mêmes ne se rendent pas vers les structures existantes… par peur du diagnostic d’abord, mais aussi des discriminations. Deux craintes qui finissent par s’autoalimenter. Car en Europe, les séropositifs sont l’objet d’inégalités criantes. Certains ont également tendance à sous-estimer le risque d’une infection.


Résoudre ce malaise n’est pas simple. L’ECDC suggère donc de lancer une politique active destinée à saisir la moindre occasion de réaliser un dépistage, de parler prévention, tout en ciblant les personnes les plus à risque.

Mais dans les faits, seuls 22 pays ont fait de la prévention du VIH chez les HSH leur priorité. Sur le plan concret, moins de 20 proposent une prophylaxie post-exposition et seuls deux offrent aux populations vulnérables la prophylaxie pré-exposition (PrEP), qui protège contre le virus.

Les données manquent

Pour mieux prévenir, il faut connaître sa cible. Or, certains pays n’ont même pas évalué le nombre de HSH au sein de leur population, souligne l’ECDC. L’organisme appelle donc de ses vœux des données plus précises sur les comportements à risque. En France, par exemple, 61 % des HSH ont eu au moins un rapport anal non protégé dans les 12 mois, avec un partenaire régulier mais au statut sérologique inconnu

Les données sur la consommation de drogue autour des rapports sexuels se font plus rares. Globalement, le chem sex est inférieur à 3 %. Mais jusqu’à 21 % des HSH le pratiquent dans certains pays. Sauf qu’une trentaine de pays ne dispose pas de données à ce sujet.

C’est pourtant à partir de ces éléments que les pouvoirs publics pourront lutter efficacement contre les inégalités et les discriminations dont sont victimes les HSH. Car dans plus de la moitié des pays de l’Europe et d’Asie centrale, stigmatisation et discrimination sont un frein à la prévention et au dépistage.