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Neurosciences

Chagrin d'amour : un placebo pour calmer sa douleur

Par Anne-Laure Lebrun

Un chagrin d'amour provoque une douleur bien réelle dans le cerveau. Mais elle peut être soulagée efficacement par un simple placebo.

massonforstock/Epictura
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« Un chagrin d’amour ne dure que jusqu’au prochain amour », disait Pierre Perret. Submergé par la douleur et les larmes, il est bien souvent difficile d’entendre cette phrase. Et pourtant elle dit vrai. Pour rebondir après une séparation, se dire que l’on fait tout ce qu’il faut pour aller de l’avant permet de guérir son cœur brisé. Dans Journal of neuroscience des chercheurs de l’université du Colorado expliquent que cette capacité de persuasion impacte les régions cérébrales impliquées dans la régulation des émotions et la perception de la douleur.

« La séparation est l’une des expériences émotionnelles les plus négatives que puisse ressentir un être humain, et elle peut être un déclencheur de pathologies psychologiques comme la dépression, explique Leonie Koban, co-auteure des travaux. Dans notre étude, nous avons montré que l’effet placebo peut réduire cette douleur ».


Une douleur bien réelle

Les neuroscientifiques sont parvenus à montrer ce puissant effet placebo en observant un groupe de 40 volontaires récemment séparés. Ils leur ont demandé de d'apporter une photo de leur ancien partenaire ainsi qu’un bon ami à eux afin d’analyser leur activité cérébrale générée par le visionnage de ces photos.

Installés dans l’IRM, les participants ont dû se rappeler de leur rupture tout en regardant le visage de leur ex, puis celle de leur proche. Un test contrôle a également été réalisé afin de visualiser la zone de la douleur dans leur cerveau. Pour cela les chercheurs ont appliqué un objet chaud sur leurs bras. Les volontaires ont ensuite été invités à mesurer leurs émotions sur une échelle de 1 (tout va mal) à 5 (tout va pour le mieux).

Pour aller mieux, il faut y croire

L’analyse des clichés IRM révèle que la douleur émotionnelle et physique activent des régions cérébrales similaires. Pour le Pr Tor Wager, professeur de psychologie et neurologie à l’université du Colorado, le message envoyé aux cœurs brisés est important : « Sachez que votre douleur est réelle, elle existe sur le plan neurochimique ».

Cela signifie donc, en théorie, qu’elle peut être guérie par des traitements. La moitié des volontaires a donc reçu un spray nasal censé atténuer leur douleur. L’autre moitié a reçu le même spray nasal tout en sachant que ce n’était qu’une solution saline. Résultat : les participants pensant recevoir un traitement efficace ont expérimenté une douleur moins forte lorsqu’ils ont été exposés à la photo de leur ancien amoureux car leur cerveau a réagi différemment. Plus précisément, leur cortex préfrontal dorsolatéral, une zone jouant un rôle clé dans la gestion des émotions, a été activé plus fortement.

Pour les auteurs, cette réaction cérébrale pourrait influencer la production d’opioïdes naturelles ou de la dopamine, des substances capables de soulager la déprime. « Rien que le fait de faire quelque chose pour soi et s’engager dans quelque chose qui redonne de l’espoir peut avoir un impact », assure Pr Wager.

Ainsi, si vous êtes en plein milieu d’une rupture, « lancez-vous dans une activité qui vous fera du bien et très probablement vous vous sentirez mieux », conseille Leonie Koban.