« En 2009, après la naissance de mon 3ème enfant, mon mari et moi savions que ce serait le dernier. Je savais que rien ne me ferait changer d’avis. En plus, j’en avais marre de prendre la pilule depuis 15 ans. Je me suis donc fait poser mes implants définitifs en 2010, et depuis, je ne l’ai jamais regretté », confie Christelle, 38 ans sur un forum. Comme elle, un peu plus de 30 000 femmes choisissent chaque année la « stérilisation » volontaire à visée contraceptive en France. « C’est une pratique assez marginale contrairement à d’autres pays notamment anglo-saxons. Parmi les différentes contraceptives, 33% des anglais choisissent une contraception définitive et 36% des Américains », explique le Pr Philippe Descamps, chef du pôle mère-enfant du CHU d’Angers. Même constat chez les hommes, seuls 1 500 ont recours à la stérilisation définitive.
Pourquoi un tel désamour des Français pour la contraception définitive ? Selon les spécialistes, il y aurait plusieurs raisons : la France est un pays à forte tradition nataliste et il semble que les Français aient peur de l’irréversibilité de ces techniques. Nombreux sont ceux qui craignent de le regretter. Pourtant, d’après les études de suivi des patientes y ont eu recours, le taux de regret serait minime.
Ecoutez le Pr Hervé Fernandez, chef du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital du Kremlin Bicêtre : « Le taux de regret est extrêmement faible, après la pose d’implant c’est 0,08%. Une des raisons, c’est que les femmes qui le font en France ont déjà un certain âge. L’âge médian est de 41 ans. »
Une légalisation récente
Autre raison, la contraception définitive n’est légale en France que depuis la loi du 4 juillet 2001. Avant, elle était considérée comme un acte de mutilation. Les médecins n’avaient le droit de la pratiquer que dans un cadre thérapeutique, par exemple lorsque la survenue d’une grossesse pouvait causer la mort d’une femme. Certains acceptaient de la pratiquer sous le manteau. Cette loi a également permis de mettre en place un cadre à ces interventions. Il est nécessaire que le ou la patiente soit majeure et qu’il ou elle donne son consentement éclairé. En pratique, la France est aussi le seul pays où après la 1ère consultation, un délai de réflexion de 4 mois est obligatoire avant l'intervention.
Un manque d’information
Dernier frein au développement de la contraception, le défaut d'information y compris chez les professionnels de santé. Selon des chiffres de 2007, 25% des gynécologues demandaient encore l'avis écrit du conjoint avant d'accepter de pratiquer l'intervention alors qu'il n'est évidemment pas nécessaire.
Combien de femmes savent qu’elles disposent aujourd’hui de 2 méthodes de stérilisation remboursées par la sécurité sociale quel que soit leur âge? Un certain nombre connaissent au moins de nom, la chirurgie de ligature des trompes, mais rares sont celles qui ont déjà entendu parler de la méthode non chirurgicale. Celle qui consiste à placer un petit implant à l'intérieur de chaque trompe et qui est pourtant la technique de référence d'après la Haute Autorité de Santé chez la femme autour ou après 40 ans.
Cette pose d’implants est une technique moins invasive que le ligature des trompes, puisqu’elle se fait en une dizaine de minutes par les voies naturelles, sans anesthésie et en ambulatoire. Il faut ensuite 3 mois pour que la stérilisation soit effective, le temps que les implants se moulent et bouchent définitivement les trompes. Pendant ce délai de 3 mois, une autre contraception est nécessaire, et un contrôle par radiographie ou échographie est ensuite recommandé pour vérifer le bon positionnement des implants.
Ecoutez le Pr Hervé Fernandez : « Ces implants font moins d’1 mm de diamètre, au bout de 3 mois on va occlure définitivement la relation entre l’ovaire et l’utérus. L’efficacité actuelle est de 99,7% »
Des idées reçus
« La pose d’implant intra-tubaire n’est pas douloureuse, dans 95% des cas. C’est un peu comme la mise en place d'un stérilet, enfin de 2, puisqu’il y a 2 dispositifs à introduire dans les trompes », précise le Pr Philippe Descamps. D'autres redoutent qu'une ligature des trompes ou la pose d’implants risque de les rendre moins femme ou d'accélérer le vieillisement. En fait, il n’y a aucune conséquence après la stérilisation sur le plan hormonal ou sexuel. Les trompes et les ovaires sont deux entités bien différentes, par conséquent ces derniers continueront à fabriquer normalement des hormones jusqu’à la ménopause. « Ces interventions de stérilisation n’ont aucun impact sur les règles, ni sur l’abondance, ni sur la durée », ajoute le Pr Philippe Descamps. La seule chose qui change c’est que, définitivement, on ne peut plus avoir d’enfant naturellement.