7 000 personnes, dont 5400 enfants. La liste des individus qui ne savent pas s’ils ont été correctement vaccinés est longue. Emanuela Petrillo, une infirmière de 31 ans, aurait fait semblant de vacciner ses patients entre 2009 et 2016, estime le parquet de Trévise (Italie), qui l’a mise en examen début mai pour faux, abus de pouvoir et escroquerie. La femme risque jusqu’à 10 ans de prison, une amende élevée, et des dédommagements pouvant atteindre le million d’euros.
La supercherie aurait pu passer inaperçue sans les contrôles post-prophylaxie de routine de la section régionale de la Sécurité sociale. En testant une partie de la population de moins de 15 ans de la région, elle s’est aperçue que 20 des 22 patients vaccinés par cette infirmière ne présentaient pas d’anticorps, laissant peu de doute sur le fait qu’ils n’ont pas été réellement vaccinés.
Une défense bancale
Les 500 familles de la région de Trévise, dont les membres auraient dû être vaccinés par Mme Petrillo, ont été rappelés par les autorités sanitaires pour être correctement immunisés. D’autres patients, du côté d’Udine, où avait travaillé l’infirmière, pourraient également être convoqués.
Négligence, acte criminel gratuit ou acte militant ? Le mobile « anti-vaccination » semble être étudié par la justice, même si l’accusée se défend de telles motivations. « J’ai toujours été pour la prophylaxie, et j’ai toujours vacciné tous les enfants », rapporte le Quotidien du médecin.
Une défense qui ne tient pas face aux preuves, et fragilisée par les témoignages de ses collègues, qui s’étonnent de n’avoir jamais entendu pleurer les enfants qui lui étaient confiés pour les injections vaccinales. « On avait l’impression qu’elle posait l’aiguille sur le bras et faisait semblant ».
Accusation dont se défend Emanuela Petrillo en avançant une technique spéciale permettant de piquer les patients sans qu’ils ne s’en rendent compte… Pas sûr que la justice y soit réceptive.
Débat sur la vaccination
Cette affaire intervient en plein débat chez nos voisins transalpins. Depuis quelques années, des groupes anti-vaccination sont passés à l’offensive, au grand désespoir des autorités sanitaires. La rougeole, en particulier, ressurgit. Depuis le début de l’année 2017, le nombre de cas aurait presque déjà rattrapé celui de toute l’année 2016, soit 844.
Cette résurgence suit une baisse notable de la couverture vaccinale, qui s’élevait à 88 % chez les enfants de 2 ans en 2013, à 86 % en 2014, et à 85,3 % en 2015. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande la vaccination de 95 % de la population pour éviter les épidémies.
Une affaire politique
Les postures du Mouvement 5 étoiles, groupe politique dirigé par Beppe Grillo, ne seraient pas étrangères à cette tendance. Bien qu’il s’en défende aujourd’hui, le leader politique a critiqué la vaccination systématique, arguant la disparition de la polio ou de la diphtérie, et même un temps relayé les fausses rumeurs de liens entre vaccination et autisme, ou les dangers de l’immunisation anti HPV.
En réaction, les autorités sanitaires italiennes prennent le contrepied, réfléchissant à un retour de l’obligation vaccinale pour certaines maladies.
Les ligues anti-vaccinales à l’offensive
Aux États-Unis, où les ligues anti-vaccinales sont de plus en plus influentes, la rougeole refait aussi son apparition. Éradiquée en 2000 sur le territoire américain, sa réapparition a fait suite aux rumeurs et fausses recherches reliant son vaccin à des troubles du spectre autistique.
Dans le Minnesota, dont les communautés pauvres et émigrées – bénéficiant habituellement d’une couverture vaccinale excellente – ont été particulièrement visées par les campagnes antivaccinales, le nombre de cas est en forte hausse, parallèlement à la baisse des immunisations.
Depuis le début de l’année 2017, 44 cas ont été confirmés, faisant de cette résurgence la plus forte épidémie depuis 1990, où 460 cas avaient été répertoriés sur l’année. En 2014 aux États-Unis, 667 cas de rougeole avaient été répertoriés. Presque 400 d’entre eux l’avaient été dans la population Amish de l’Ohio, qui refuse la vaccination.