Il est l’homme vivant le plus gros du monde. Ou du moins, il l’était. Juan Pedro Franco Salas pesait, il y a quelques mois, 595 kg. Il a perdu 175 kg depuis, suivant un régime draconien, afin de pouvoir subir un bypass gastrique. L’opération chirurgicale est censée lui assurer une perte de poids durable, essentielle pour le maintenir en vie.
Elle consiste à retirer la partie inférieure de l’estomac. La partie restante est alors reliée directement à l’intestin grêle, plus loin dans le tube digestif. La procédure permet à la fois d’atteindre plus rapidement la sensation de satiété, et de limiter l’absorption des nutriments dans la première partie de l’intestin.
« L'opération a pratiquement été une ablation totale, a déclaré José Antonio Castañeda, le chirurgien qui a opéré le Mexicain de 32 ans, lors d’une conférence de presse. Nous attendons de voir comment son corps répond à ce changement et nous espérons que tout ira bien. » Les chirurgiens ont retiré les trois quarts de son estomac. « Nous espérons ainsi que dans les trois prochains mois, il perdra de 40 à 50 % de son excès de poids », a-t-il ajouté.
Défaillances d’organes vitaux
Les bénéfices de l’opération ne se limitent pas à un gain esthétique ou pratique, dans la vie de tous les jours. Les personnes en obésité morbide souffrent de nombreuses pathologies, qui réduisent considérablement leur espérance de vie. Une étude publiée en 2016 dans The Lancet évaluait la perte à 10 ans chez les obèses sévères (IMC entre 35 et 40).
« On sait que l’obésité rend plus sensible aux infarctus du myocarde, expliquait en novembre dernier à Pourquoidocteur le Pr David Nocca, chirurgien de l’obésité au CHU de Montpellier. Le cœur grossit mais la graisse se stocke dans le muscle, y compris au niveau du cœur. Il va grandir en taille mais perdre en fonction contractile. C’est un début d’insuffisance cardiaque. »
Insuffisance pulmonaire
Les personnes en obésité morbide souffrent également de problèmes de retour veineux, de phlébites, qui aggravent une insuffisance respiratoire mécanique. « Paradoxalement, plus l’obèse est volumineux, plus le poumon est petit, ajoute le Pr Nocca. La fonction respiratoire est diminuée de façon importante : il n’y a pas assez de place pour que les poumons s’étendent. La graisse prend plus de place et la cage thoracique a plus de mal à s’étirer, d’autant que les muscles fonctionnent moins bien. »
L’obésité favorise aussi le diabète, et les troubles des lipides sanguins, qui augmentent les risques vasculaires (AVC) et cardiaques, ou des insuffisances rénales. Dans les cas aussi extrêmes que celui de Juan Salas, tous ces risques s’accumulent. Les risques d’infection sont aussi à prendre en compte. Le jeune homme, totalement sédentaire en raison de son poids, était à risque de développer des escarres infectieuses.
Pour toutes ces raisons, l’opération devenait une urgence. Mais le Mexicain a dû perdre du poids pour subir l’opération... beaucoup de poids : 175 kg ! Pour faciliter le travail des chirurgiens, que la graisse abdominale peut gêner, mais aussi parce que l’anesthésie représente un danger non négligeable.
« Cela reste difficile et plus à risque que pour quelqu’un de poids normal, explique le Pr Nocca. Pour adapter les doses, beaucoup de questions restent sans réponse en 2016. Les anesthésistes-réanimateurs sont souvent dans l'embarras pour administrer des médicaments. Il faut vraiment s’intéresser à la pharmacologie de l’obèse. »