Alors que le Venezuela est miné par des problèmes économiques, politiques et sociaux, une catastrophe sanitaire prend forme. Avec une hausse de 30 % de la mortalité infantile et de 65 % de la mortalité maternelle en 2016, le gouvernement de Nicolas Maduro a décidé ce jeudi de réagir, en remplaçant sa ministre de la Santé, Antonieta Caporales, par Luis López Chejade.
Après un an sans statistiques sur l'état de santé du pays, un rapport alarmant publié ce mardi avait en effet révélé une dégradation spectaculaire. « C’est frappant, dans presque toutes les catégories listées par ce bulletin, la situation sanitaire est tourmentée, avait alors déploré le Dr Julio Castro, spécialiste des maladies infectieuses, et opposant déclaré aux politiques sanitaires du gouvernement. On retrouve des hausses particulièrement significatives dans la mortalité infantile et maternelle. »
En 2016, 11 466 décès d'enfants de moins d'un an ont été enregistrés. Les mères ne sont pas plus à l’abri : 756 femmes enceintes ou ayant accouché dans les 42 jours sont décédées.
Des maladies oubliées
Du côté des maladies, le nombre de cas de paludisme a explosé de 76 % pour dépasser les 240 000 personnes atteintes. Pour ne pas arranger la situation, le virus Zika est venu s’ajouter à la liste, avec presque 60 000 personnes touchées.
Des maladies d’un autre temps ont aussi refait leur apparition : la diphtérie, pourtant éradiquée dans le pays d’Amérique du Sud depuis les années 1990, a affecté 324 personnes en 2016. Elle tue dans 5 à 10 % des cas.
Des médecins avaient pourtant alerté sans succès les autorités sanitaires du retour de l’infection. Le pouvoir les avait accusé de chercher à semer la panique dans la population.
Plus de médicaments
Le Venezuela, en proie à de graves difficultés économiques, et victime d’une inflation exceptionnelle de presque 1 000 % en deux ans, peine désormais à importer. En particulier, le matériel médical fait défaut, et la pénurie de médicaments est presque systématique.
Dans les hôpitaux, le manque d’incubateurs, d’acide folique, et même de nourriture ne permettent plus d’assurer la sécurité des mères et de leurs futurs bébés, qui meurent de septicémie, de pneumonie, ou encore de syndrome de détresse respiratoire. Iils pourraient être soignés si le système de santé fonctionnait correctement.
Les médecins doivent désormais se contenter de médicaments de second choix, alors que 85 % des produits manquent à l’appel. Les patients peinent à se ravitailler. Les plus riches se fournissent à l’étranger, alors que les moins chanceux font des heures de queue devant les pharmacies, souvent en vain, ou utilisent le troc.
Un avenir incertain
Le gouvernement Maduro, qui subit depuis 2014 les manifestations de ses opposants, et en minorité au Parlement, refuse pour l’instant de céder aux 80 % des Vénézuéliens qui demandent son départ, d’après les sondages. Il accuse même des élites malintentionnées d’organiser la pénurie de médicaments pour entretenir l’agitation populaire et les troubles sociaux.
Entre les difficultés économiques liées à la chute des prix du pétrole, sur lequel le Venezuela repose presque entièrement (il représente 96 % de ses exportations et deux tiers de ses recettes), et un dirigeant qui s’accroche au pouvoir, méprisant au passage les questions sanitaires, les pénuries risquent de s’aggraver. Le pronostic santé des 30 millions de Vénézuéliens n’est pas bon.