Cette phrase glaçante est sans doute la plus percutante du rapport parlementaire sur la fibromyalgie, remis il y a 7 mois, jour pour jour. « Nous ne mourons pas, certes, mais nous ne vivons pas non plus. » Avec ses 20 propositions, le document a fait parler de lui. Avant de retomber dans l’oubli. En cette Journée mondiale de la fibromyalgie, ce 12 mai, force est de constater que les demandes de l’Assemblée nationale sont restées lettre morte.
La liste des suggestions n’avait pourtant rien de sorcier : mieux connaître l’épidémiologie de ce trouble, placer les cas les plus sévères en affection de longue durée (ALD), structurer le parcours de soins… Ce rapport a eu le bon goût de réclamer du concret. Bilan avec son auteur principal, le député de l’Oise Patrice Carvalho (Front de gauche).
Votre rapport a-t-il été suivi d’effets ?
Patrice Carvalho : Venant de Marisol Touraine, pas du tout. Mais les choses bougent dans le corps médical. Des médecins qui n’appréhendaient pas bien la maladie commencent à s’y intéresser. Des formations ont été mises en place et permettent aux médecins de mieux comprendre de quoi on parle. La douleur est tellement disparate d’un malade à l’autre que c’est difficile à bien diagnostiquer. Je pense que le rapport a fait évoluer les choses. On parle de la fibromyalgie et on a ramené la maladie au cœur du débat. Cela permet de stimuler la réflexion.
Deux autorités sanitaires ont été saisies…
Patrice Carvalho : J’attends beaucoup du rapport d’expertise de l’Inserm (Institut national de la santé et la recherche médicale, ndlr). Quand il sera rendu public, je demanderai au nouveau président de la République de faire de la fibromyalgie une cause nationale. Il me semble essentiel que le gouvernement s’en préoccupe. Marisol Touraine, dans son obstination à ne pas augmenter les dépenses, n’a pas voulu qu’on parle de la maladie mais de la douleur uniquement.
Quelles sont les priorités ?
Patrice Carvalho : Dès que le ministre de la Santé est nommé, je veux le rencontrer pour que les choses bougent. On a fait un rapport, on a fait passer des amendements. Mais tout cela est resté lettre morte. Les fibromyalgiques ne comprennent pas pourquoi les lois ne sont pas promulguées. Il faut communiquer avec les malades, qu’ils soient réconfortés. Les patients ont besoin d’un statut, comme les personnes diabétiques ou atteintes d’un cancer. Là où les choses ont le plus progressé, c’est dans les centres antidouleurs. La solution est là : le parcours de soins doit être structuré. Tant que le corps médical reste dans l’ignorance, les choses ne s’arrangeront pas.
Votre rapport soulignait le coût élevé de la fibromyalgie
Patrice Carvalho : Oui. Les gens prennent beaucoup de médicaments sans savoir si c’est adapté. Certains utilisent des médicaments destinés à la psychiatrie, d’autres des antalgiques à tour de bras. Ce ne sera pas sans effet à l’avenir. Il faut aborder les choses différemment. Si on ne trouve pas de remèdes, ce sera de pire en pire. Aujourd’hui, on a une vision à court terme. Mais 2 millions de personnes sont touchées. Et certains médecins ne connaissent toujours pas la maladie, tandis que ceux de la Sécurité sociale refusent de la reconnaître et rejettent des arrêts de travail. C’est une vraie souffrance.