Une « bombe à retardement ». C’est à cela que doit s’attendre le National Health System (NHS), le système de santé anglais. Une explosion de difficultés, bientôt insurmontables si aucun investissement n’est consenti dans le secteur de la santé publique.
Le ton qu’empruntent les experts de la British Medical Association (BMA) dans leur rapport adressé à Theresa May est grave. Les services de santé ont atteint « un point de rupture », expliquent-ils. Cette situation est due à la conjonction de deux éléments : des modes de vie dont l’hygiène se dégrade, et des coupes budgétaires dont le rythme s’accélère.
Echecs
Car d’ici 2021, le gouvernement britannique envisage de réduire le budget du NHS de 400 millions de livres (470 millions d’euros). Or, l’échec des autorités à réduire l’inflation persistante d’obésité, de tabagisme et de binge drinking au sein de la population risque, dans ce contexte budgétaire, de plonger le système « dans le rouge » et de condamner des millions de patients à souffrir de maladies évitables.
« En Angleterre, les gouvernements successifs n’ont pas réussi à mettre au point des stratégies sur le long terme pour améliorer la santé publique ; des mesures à l’efficacité scientifiquement prouvée ont été jetées aux oubliettes », déplorent les rapporteurs.
Les médecins demandent ainsi au gouvernement de prendre des mesures volontaires en matière de santé publique, lesquelles demanderont autant de courage politique que d’investissements financiers. Cela passe, expliquent-ils, par une « régulation beaucoup plus stricte de l’industrie agroalimentaire et des boissons sucrées, des taxes sur l’alcool et un soutien aux fumeurs pour qu’ils se sèvrent ».
1 £ investie = 14 £ économisées
Les auteurs recommandent ainsi une taxe de 20 % sur les boissons sucrées (soit beaucoup plus que les projets à l’étude) ou encore la mise au point de nouveaux objectifs pour réduire la consommation de graisses, de sucre et de sel à travers, par exemple, l’établissement d’un code nutritionnel sur les aliments – à l’image de celui que la France est en train d’adopter. Ils proposent également un prélèvement annuel sur les entreprises du tabac.
Il faut donc prévenir, mais aussi traiter. En Angleterre, l’obésité a été à l’origine de 525 000 hospitalisations en 2016. Le taux d’obésité a bondi de 15 % en 1993 à 27 % en 2015. Globalement, 68 % des hommes et 58 % des femmes souffrent de surpoids ou d’obésité dans le pays.
Chaque livre sterling investie dans la santé publique génère une économie future de 14 livres sterling, insistent les scientifiques, qui rappellent le cas du diabète de type 2. Dans bien des cas, cette pathologie est « entièrement évitable à travers des approches de santé publique ». Et pourtant, les coûts associés à la maladie ont été estimés à 8,8 millions de livres en 2011. D’ici 2035, ils auront doublé, si la logique du court-termisme perdure, préviennent encore les auteurs.