Les crises sociales et économiques s’accompagnent souvent d’une montée de l’autoritarisme politique et des populismes. Beaucoup y voient un lien avec la pauvreté, mais l’analyse de ces phénomènes passe souvent par le prisme de facteurs contextuels.
Des chercheurs du Laboratoire de sciences cognitives de l’Inserm, en association avec SciencesPo, ont tenté d’interpréter les choix politiques en fonction de paramètres psychologiques.
Le résultat de leur étude, publiée dans la revue Evolution and Human Behavior, montre que l’exposition à la pauvreté dans l’enfance augmente la préférence pour des personnalités politiques dominantes et peu dignes de confiance. Et ce, quelle que soit la condition socio-économique des sujets à l’âge adulte.
Dominants et peu dignes de confiance
Pour arriver à ces conclusions, l’équipe a réalisé plusieurs expériences. En s’appuyant sur des résultats montrant que de simples jugements sur les visages de candidats permettaient de prédire les résultats d’élections politiques, ils ont donné à observer différents visages à des enfants, puis à des adultes. Ces visages présentaient des caractéristiques correspondant à différents niveaux de confiance et de dominance.
Quarante et un enfants de 7 ans ont dû choisir, parmi ces visages, quelle personne ils préféraient avoir comme capitaine d’équipe pour une randonnée en montagne. Ceux confrontés à des conditions socio-économiques défavorables choisissaient plus volontiers des capitaines d’apparence plus dominante, et moins digne de confiance.
Dans un deuxième temps, ils ont, en partenariat avec l’institut de sondage Ipsos, présenté aléatoirement deux visages à des adultes, en leur demandant pour qui ils auraient le plus tendance à voter. Là aussi, le statut social dans l’enfance influençait les choix vers les visages les plus autoritaires et suspects.
Le choix de l’autoritarisme
Enfin, Les chercheurs ont analysé plus directement le rapport à l’autoritarisme, en analysant l’adhésion des participants à l’affirmation suivante : « Je pense qu’avoir à la tête du pays un homme fort qui n’a pas à se préoccuper du parlement ni des élections est une bonne chose ». Encore une fois, les personnes ayant souffert de pauvreté dans leur enfance y répondaient plus positivement.
Cette étude, réalisée sur des Français, mais aussi sur un échantillon d'habitants de 46 autres pays européens, ne conclut cependant pas à un déterminisme politique en fonction des origines sociales. La pauvreté dans l’enfance influence mais ne définit pas les choix politiques futurs.
Ces travaux montrent cependant que dans une période de montée du populisme en Europe, les origines sociales peuvent influencer, au moins en partie, des choix politiques. Dans un contexte où les choix de vote dépendent souvent du charisme des candidats, cette analyse de l’Inserm pourrait donc être significative.