Si le monde de la santé a accueilli avec enthousiasme la nomination d’Agnès Buzyn dans le gouvernement Macron, les acteurs ne sont pas pour autant devenus amnésiques.
Après une brillante carrière comme hématologue à l’hôpital, la ministre des Solidarités et de la Santé a dirigé pendant cinq ans l’Institut national du cancer (INCa) avant de rejoindre en 2016 la Haute Autorité de santé (HAS). Dans ses premières fonctions, cette hospitalo-universitaire était chargée de mettre en œuvre le plan cancer en direction de patients ; à la HAS, elle devait aider les médecins à améliorer les pratiques médicales avec des recommandations.
A la tête de l’INCa, Agnès Buzyn s’est fait le porte-drapeau d’une politique de santé publique ambitieuse et responsable. Avec comme priorité, rappelle Jean-Yves Nau dans Slate, la lutte contre le tabac. « Nous devons repenser en profondeur notre système de lutte contre le tabagisme face à cette bombe à retardement sanitaire. La médecine est à court d'arguments, le temps est à la volonté politique », clamait-elle dans une tribune publiée par le journal Le Monde.
Parmi les mesures préconisées, une « hausse drastique » du prix de tabac. Un engagement renié par tous les gouvernements depuis le plan cancer (2003-2007) mis en œuvre par Jacques Chirac.
Sur l’alcool, cette spécialiste avait fait montre de la même détermination. En 2015, Agnès Buzyn avait dénoncé le détricotage de la loi Evin élaboré par des députés très à l’écoute des milieux viticoles. « Je suis profondément atterrée par cette initiative de certains parlementaires qui obéissent à des lobbys très puissants et très bien installés en France, ceux des producteurs de vins », dénonçait-elle. A l’époque, le ministre de l’Economie faisait entendre sa différence en indiquant que cet assouplissement « ne contrevenait pas à la santé publique ». Il s’appelait Emmanuel Macron !
Après les paroles, vient donc le temps des actes. Comment la nouvelle ministre pourra-t-elle mettre en adéquation ses engagements avec la feuille de route présentée par Emmanuel Macron ? La réponse engagera non seulement le secteur de la santé mais aussi la crédibilité du président de la République. En matière d’addiction, une véritable politique des réductions des risques, que détaille Jean-Yves Nau, serait un véritable marqueur du changement.