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Décès du père

Un deuil pendant la grossesse réduit la longévité des enfants

Par Antoine Costa

Les enfants dont le père est mort avant leur naissance vivraient moins longtemps que les autres. Ils seraient plus à risque de décéder avant 65 ans. 

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Le stress ressenti par les parents pourrait avoir de lourdes répercussions sur les enfants, et ce, même avant leur naissance. Dans la revue scientifique PNAS, des chercheurs français de l’Inserm (1) rapportent que les orphelins de la Première Guerre mondiale ont perdu en moyenne 2 ans de longévité. La raison ? Le stress subi par la mère, lors de la grossesse, à la suite du décès de son mari.  

La littérature scientifique suggère que le stress maternel fragiliserait l’enfant. Des études sur l’exposition à la famine pendant la gestation ont notamment montré que la progéniture est plus à risque de maladies cardiovasculaires ou mentales.

Ici, les scientifiques français se sont intéressés aux conséquences sur la mortalité des enfants soumis à ce stress prénatal. Pour cela, ils ont fouillé la base de données du ministère de la Défense recensant les 1,4 million de morts de la Grande Guerre, ainsi que 90 000 actes de naissance établis entre 1914 et 1916. Un travail minutieux qui leur a permis d’identifier plus de 2 600 pupilles de la nation, dont le père est décédé au combat avant leur naissance.

 

 

Deux années de vie perdues

Le parcours de vie de chacun de ces enfants a ensuite été comparé à celui d’un enfant « témoin » né à la même époque dans la même commune, d’une mère d’âge comparable. Il apparaît que la longévité des enfants dont le père est mort avant leur naissance a été écourtée de 2,4 ans. Si le décès est survenu au dernier trimestre de grossesse, les orphelins ont vécu 4 ans de moins. Ces enfants avaient plus de risques que les autres de décéder avant 65 ans, ajoute l’étude.
En revanche, la durée des vies des enfants dont le père est mort après leur naissance était égale à celle de leurs témoins.

Pour les auteurs, cette étude historique révèle pour la première fois qu’un stress psychologique ressenti par la mère peut augmenter le risque de mortalité prématurée. Les auteurs suggèrent que le stress imprime « des marques de deuil » sur ces orphelins. Ces marques pourraient être des modifications épigénétiques, des modifications chimiques qui n’altèrent pas la séquence d’ADN, mais perturbent l'expression de certains gènes.


(1) Unité Inserm 1169 « Thérapie génique, génétique, épigénétique en neurologie, endocrinologie, cardiologie et développement de l’enfant ». Travaux de Nicolas Todd, avec Pierre Bougnères et Alain-Jacques Valleron.