Plusieurs études ont déjà montré l’efficacité de l’aspirine en prévention des cancers digestifs, et en particulier des cancers colorectaux. Selon les études, elle pourrait en prévenir entre 20 et 30 %. Mais, même une fois le cancer déclaré, elle pourrait se montrer utile.
Avec d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), comme l’ibuprofène ou le naproxène, elle fait baisser la mortalité toutes causes confondues de 25 % lorsqu’ils sont pris par des patients récemment diagnostiqués d’un cancer colorectal.
Ils font encore mieux chez les malades qui ne présentent pas de mutation du gène KRAS (soit environ 60 % des patients). Chez eux, l’amélioration de survie monte à près de 40 % !
Utilisation en prévention secondaire
Ces résultats sont issus d’une étude observationnelle menée sur 2 419 patients de 18 à 74 ans diagnostiqués d’un cancer colorectal invasif, entre 1997 et 2008, aux États-Unis, au Canada et en Australie. Pendant l’étude, 381 décès ont été enregistrés, dont 100 ont pu être directement attribués au cancer.
« Ces résultats devraient susciter le dialogue entre les patients et leurs médecins, explique le Dr Polly Newcomb, épidémiologiste au centre de recherche sur le cancer Fred Hutchinson (États-Unis), et l’un des auteurs de cette étude, publiée dans le Journal of Clinical Oncology. Les AINS sont couramment prescrits dans la prévention des maladies cardiovasculaires, et leur utilisation mérite d’être considérée et étudiée comme outil de lutte contre le cancer. »
Des effets secondaires
L’aspirine est en effet très souvent utilisée en prévention secondaire d’accidents ischémiques, après un infarctus du myocarde ou un accident vasculaire cérébral, pour éviter les rechutes. Les propriétés anti-agrégantes plaquettaires de l'aspirine empêchent les vaisseaux sanguins de se boucher à nouveau.
Les résultats précédents sur le cancer colorectal montrant une baisse drastique des risques chez les personnes prenant régulièrement de l’aspirine pourraient donc encourager à l’utiliser en prévention. Mais ses effets secondaires (ulcères, saignements) limitent cette utilisation. Comme l’aspirine, les autres AINS sont également associés à des risques : rénaux, voire cardiaques.
Efficace et pas cher
En revanche, ces nouveaux résultats pourraient mener à un renforcement de l’approche des traitements dans les cancers colorectaux. « Maintenant, nous aimerions comprendre le bon timing, les doses et la durée optimales de l’utilisation des AINS, notamment chez les patients qui n’ont pas la mutation génétique KRAS, ajoute Xinwei Hua, épidémiologiste et auteur principal de l’auteur. Nous commençons juste à comprendre les phénomènes biologiques au niveau moléculaire de la tumeur, et c’est très enthousiasmant. »
Quand des médicaments si bien connus, très accessibles et présentant des effets secondaires relativement peu nombreux, donnent des résultats aussi significatifs, il serait dommage de s’en priver.