Trois à quatre millions : c’est le nombre de morsures de serpent qui surviennent chaque année dans le monde. Un nombre élevé qui n’est pas reflété par l’intérêt de la scène internationale. Au contraire, ces incidents ont rejoint la liste des maladies tropicales négligées. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) en a fait le choix à l’issue d’une réunion avec plusieurs pays touchés par ce fléau silencieux.
Les morsures de serpent surviennent surtout en milieu rural et touchent principalement l’Asie du sud-est et l’Afrique subsaharienne. Cette dernière région est nettement défavorisée. Seulement 1 % des personnes qui ont besoin d’un anti-venin le reçoivent. Ce manque d’accès s’explique principalement par leur coût.
Des milliers de décès annuels
Très efficaces, les traitements indiqués lors d’une morsure de serpent limitent le risque de séquelles. Mais il faut compter 250 à 500 euros par personne, « ce qui est très supérieur au revenu mensuel d’une famille de paysans », précise sur The Conversation Jean-Philippe Chippaux, médecin à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Ajouter les envenimations à la liste des maladies négligées peut fournir une solution à cet écueil financier. Associations et pays peuvent espérer plus de subventions et de soutiens économiques, mais aussi un rebond de la recherche. Celle-ci est cruellement en retard.
« Il s’agit maintenant d’améliorer le recueil de données épidémiologiques, de former le personnel de santé à la prise en charge des morsures de serpent, de définir les caractéristiques des anti-venins appropriés pour l’Afrique », liste Jean-Philippe Chippaux. Autant de secteurs qui profiteront d’un regain d’intérêt.
Un secteur peu rentable
Car à l’heure actuelle, les populations se tournent prioritairement vers la médecine traditionnelle et les remèdes de grand-mère lorsqu’ils sont mordus par un serpent venimeux. Résultat : 100 à 150 000 décès sont dus chaque année à ces envenimations.
A la question de la recherche s’ajoute celle de l’implication des fabricants. Le continent africain ne semble pas attractif. Pour preuve, Sanofi Pasteur a abandonné, en 2015, la production de son anti-venin Fav-Afrique. Pas assez rentable.
« Contrairement à l’Asie ou l’Amérique latine, la plupart des pays subsahariens manquent de producteurs d’anti-venins », précise le Pr Achille Massougbodji, directeur de l’IRD du Bénin.
Ces pays africains sont donc limités par les prix et les moyens de transport. D’autant que nombre d’anti-venins ne peuvent être stockés à température ambiante. Cet écueil pourrait être un jour résolu. Un laboratoire mexicain travaille à la mise au point d’un sérum stable sans rester au frais, selon La Croix.