La nouvelle ministre de la Santé a tranché. 11 vaccins seront bientôt obligatoires, contre trois aujourd’hui. Agnès Buzyn l’a confirmé ce 26 juin, selon nos informations. Elle en a fait l’annonce à l’occasion d’une rencontre avec les représentants des associations de patients. L’hématologue va donc suivre les recommandations de la concertation citoyenne, qui a remis ses conclusions à son prédécesseur, Marisol Touraine.
Avec l’obligation vaccinale, Agnès Buzyn hérite d’un dossier délicat. En février dernier, le Conseil d’Etat a accéléré le tempo. Le DT-Polio, qui contient les trois souches obligatoires, doit être disponible pour tous. Il a laissé six mois au gouvernement pour agir. Cette période expire le 8 août.
La ministre de la Santé est déterminée à faire progresser la politique vaccinale. Comme beaucoup, elle reconnaît la difficulté de combiner obligation et recommandation. La situation doit donc être simplifiée.
Pour fixer le nombre de vaccins incontournables et obligatoires, Agnès Buzyn a pris en compte les facteurs de risque sur le territoire. Elle a arrêté son choix sur les souches utiles, nécessaires mais sans risque pour les enfants.
Consciente des hésitations du grand public, la ministre de la Santé veut assortir cet élargissement de plus de pédagogie. L’objectif est de rappeler aux Français l’importance de ce geste préventif.
La peur de l’aluminium
Mais pour le président de France Assos Santé, Alain-Michel Ceretti, la crainte de l’aluminium – utilisé comme adjuvant dans plusieurs vaccins – reste mal comprise à la tête de l’Etat. 40 % des Français expriment des doutes vis-à-vis de la sécurité des vaccins. Et l’aluminium est au cœur de ces inquiétudes, y compris parmi certaines associations membres de France Assos Santé.
« Je pense que la ministre ne mesure pas totalement la peur de l’aluminium déclenchée chez beaucoup de Français, estime-t-il. Quand on parle d’élargir à 11 le nombre de vaccins obligatoires, les personnes pensent qu’on multipliera par trois ou quatre la dose d’aluminium. » Ce qui n’est pas le cas.
La ministre devra faire preuve de persuasion pour réconcilier la population avec les vaccins. Il lui faudra sans doute plus se montrer plus claire sur l’intérêt des adjuvants et leurs risques. Une étude qui doit être menée par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) devrait l’y aider.
Responsabiliser les parents
Alain-Michel Ceretti, pour sa part, propose une autre solution : rendre les parents pénalement responsables, au lieu de faire reposer le poids sur le médecin. « Il faut une clause d’exemption qui permette aux parents de ne pas faire vacciner leurs enfants, explique-t-il. Mais en contrepartie, ils doivent tous les deux signer une décharge qui indique les conséquences médicales et sociales de la non-vaccination. » Ce qui inclut l’impossibilité d’entrer à l’école.
Sans écarter cette solution, Agnès Buzyn a souligné les difficultés juridiques que peut poser une telle proposition. Difficile, en effet, de faire coexister une obligation vaccinale et son exemption.
Un problème persiste : celui des stocks de vaccins. Plusieurs souches sont régulièrement victimes de pénuries. France Assos Santé a prévu de travailler à ce sujet avec les industriels et les pharmacies. La ministre, de son côté, dispose de plus d’armes légales pour forcer la main aux fabricants. Mais ce chantier est encore en cours.
Des généralistes contre l’obligation
Les généralistes enseignants ne veulent pas de l’obligation vaccinale. Dans un communiqué, le Collège national (CNGE) prend position contre cette mesure, qu’il juge « simpliste et inadaptée ». Selon l’organisme, faire coexister un régime obligatoire et un autre recommandé n’est, de fait, pas compréhensible. Mais des mesures moins coercitives seraient plus efficaces.
Pour le CNGE, rien ne prouve que plus d’obligation protège mieux les enfants. Cette mesure pourrait même s’avérer contre-productive, en augmentant le niveau de suspicion. Ce qui serait le cas sans campagne d’explication.
Les généralistes enseignants plaident donc en faveur d’un régime recommandé uniquement, assorti d’une campagne d’incitation qui implique les professionnels de santé. Ceux-ci sont majoritairement en faveur de la vaccination, et leurs conseils sont écoutés des parents.