Les médecins sportifs de la FIFA ont du souci à se faire. D’après une équipe de neurochirurgiens canadiens, ils ont laissé passer de nombreux cas de commotions cérébrales au cours de la Coupe du monde de 2014, organisée à Rio de Janeiro (Brésil).
Après avoir revu tous les matches de la compétition, les médecins de l’hôpital St Michael de Toronto (Canada) sont clairs : 72 collisions auraient dû faire l’objet d’un examen attentif. Ce ne fut pas le cas, déplorent-ils dans le JAMA.
64 rencontres, 12 stades, 32 pays… En nommant le Brésil pays organisateur de la Coupe du monde 2014, la FIFA a vu les choses en grand. Mais la fédération ne s’est pas montrée aussi ambitieuse au niveau de ses pratiques médicales. Sur le papier, les règles étaient pourtant prometteuses.
En accord avec les recommandations internationales, la FIFA a décrété le retrait du terrain de tout joueur présentant les signes évocateurs d’une commotion cérébrale. Perte de conscience, maux de tête ou encore temps de réaction ralenti devaient alerter. Sur le bord du terrain, les médecins devaient prendre le relais, et confirmer ou non l’incident.
Une mi-temps oubliée
Seulement, l’équipe médicale s’est montrée peu rigoureuse dans les faits. En visionnant à nouveau l’intégralité des matches, les neurochirurgiens ont observé 72 collisions entre deux têtes. C’est largement plus que les 19 blessures signalées par les médecins de la FIFA au cours de la compétition. L'Allemand Christoph Kramer est sans doute l'exemple le plus éloquent de ce laxisme.
Assommé d'un coup d'épaule lors de la finale contre l'Argentine, le milieu défensif s'écroule. Il ne sort du terrain que quinze minutes plus tard, hagard, soutenu par deux soigneurs. Quelques jours plus tard, il confie avoir oublié l'intégralité de la première mi-temps et ne pas se souvenir comment il est rentré au vestiaire. Malgré l'évidence d'une commotion cérébrale, il a continué à jouer. Jusqu'à la victoire. Les exemples de ce type sont malheureusement nombreux et ont suscité la colère du syndicat représentant les joueurs professionnels.
Un laxisme volontaire
Lors de la Coupe du monde, presque tous les chocs constatés auraient dû donner lieu à une évaluation sur la touche. Parmi les joueurs concernés, 56 % ont présenté au moins deux signes de commotion, et 27 % plus de trois. Seuls trois sportifs ont été retirés du terrain.
En réalité, seuls 12 footballeurs ont été emmenés sur le bord du terrain pour voir un professionnel de santé. 45 autres ont été examinés sur le terrain… par un co-équipier, l’arbitre ou un soignant. 21 n’ont tout simplement pas été vus, et ont continué le match sans être inquiétés.
Plus alarmant : sur les joueurs qui présentaient plusieurs signes évocateurs d’une commotion, 11 n’ont jamais été examinés. La conclusion des neurochirurgiens n’est pas flatteuse pour le staff sportif de la FIFA. D’après eux, les médecins auraient sous-signalé les cas les moins évidents afin de ne pas perdre du temps de jeu.
Au vu de ce raté, les Canadiens proposent la mise en place de soignants indépendants, et non payés par les fédérations, afin d’éviter de passer à côté d’une commotion. Car tarder à les soigner peut provoquer des lésions permanentes.