Il y a 4 ans, le baclofène était présenté comme le médicament miracle contre l’alcoolisme. Depuis, les travaux scientifiques sur ce médicament initialement indiqué dans la sclérose en plaques sont mitigés. Une nouvelle étude de la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnamts) et de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) montre qu’au-delà d’une dose journalière de 180 mg, le risque d’hospitalisation et de décès augmente considérablement.
Pour mener leurs travaux, les deux agences se sont appuyées sur les bases de données de l’Assurance maladie qu’elles ont croisées avec celles du Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc). L’analyse a été menée en collaboration avec des chercheurs de l’Inserm.
Entre 2009 et 2015, il apparaît que plus de 213 000 patients ont reçu ce médicament pour une autre indication que la sclérose en plaques. La grande majorité, 200 000 personnes, environ, l’ont utilisé pour traiter leur dépendance à l’alcool.
Faible observance
Mais ces patients ont été peu observants, à en croire cette étude. Au cours des 6 premiers mois d’utilisation, seuls 10 % l’ont pris sans l’interrompre. « In fine, comme pour les médicaments indiqués dans la dépendance à l’alcool, plus de 4 patients sur 5 débutant un traitement avec le baclofène l’arrêtent définitivement au cours des six premiers mois d’utilisation », notent la Cnamts et l’ANSM.
Le traitement par baclofène peut être lourd. Si les patients ayant besoin de hautes doses pour se libérer de leur envie de boire sont minoritaires, les auteurs ont tout de même recensé 1 400 patients traités avec des doses comprises entre 180 et 300 mg par jour et 935 personnes se sont vu prescrire plus de 300 mg/jour. Soit près de 30 comprimés par jour.
Des risques de décès multipliés par 2
Or, plus la dose est élevée, plus les risques d’hospitalisation et de décès augmentent, alertent l’Assurance maladie et l’ANSM. En les comparant avec les médicaments de sevrage « classiques », les auteurs montrent que le risque d’hospitalisation s’accroît de 15 % avec des doses variant de 75 mg/jour à 180 mg/jour. Le risque de décès est multiplié par 1,5.
Au-delà de 180 mg/jour, la fréquence des hospitalisations est augmentée de 46 % et le risque de décès est multiplié par 2,27. « En particulier, le risque d’intoxication, d’épilepsie et de mort inexpliquée (selon le certificat de décès) s’accroît avec la dose de baclofène reçue », précisent-ils.
Au vu de ces données de sécurité, l’ANSM annonce qu’elle engagera une révision de la RTU baclofène. Elle ajoute que ces résultats seront pris en compte dans le cadre du dossier de demande d’AMM dans le traitement de l’alcoolo-dépendance actuellement en cours d’évaluation.