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Lobbying

Lutte anti-tabac : le Pr Dautzenberg dénonce les agissements de BAT

Par Antoine Costa

British American Tobacco tente de convaincre les médecins influents de la lutte anti-tabac sur les nouveaux « produits à nocivité réduite ».

Nomadsoul1/Epictura

Après les révélations de Reuters sur les méthodes de lobbying de Philip Morris International, c’est au tour de British American Tobacco (BAT) de subir le retour de flamme de sa stratégie commerciale. Et c’est le Professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue à la Pitié-Salpêtrière et secrétaire général de l’Alliance contre le tabac, qui dénonce la stratégie de BAT.

Dans un message publié sur Twitter et un article du Figaro, il dénonce la tentative d’approche du leader mondial du tabac, qui lui a adressé une lettre recommandée l’invitant à discuter des « nouveaux produits à nocivité réduite », afin de « changer de logiciel quant à la lutte contre le tabagisme ».

 

 

Désaccord sur le fond…

Ploom de Japan Tobacco, iQos Philip Morris, Glo BAT : ces nouveaux dispositifs font le lien entre la cigarette et la cigarette électronique. Ils n’utilisent pas la combustion mais contiennent toujours du tabac. Une résistance électrique le chauffe à basse température, ce qui permettrait notamment de supprimer l’inhalation de goudrons et de monoxyde de carbone, d’après les fabricants.

Une affirmation que le Pr Dautzenberg conteste. « Les industriels nous jurent que ce tabac chauffé est moins toxique que la cigarette, mais ce n’est pas prouvé du tout, et il doit bien y avoir un peu de combustion quand même, puisqu’on retrouve des traces de monoxyde de carbone dans les vapeurs, estime-t-il dans Le Figaro. Aujourd’hui, le tabac tue un de ses fidèles consommateurs sur deux. Même si les tabacs “dits à moindre risque” n’en tuent qu’un sur trois ou un sur dix, voire un sur cent, cela reste inacceptable. »

Le médecin rappelle par ailleurs que ce type de réflexion avait été menée sur les cigarettes light. Une réflexion à l’époque soutenue par une partie de la communauté médicale, avant que ne soit reconnu que le risque était finalement le même. Les cigarettes light favorisaient seulement d’autres cancers respiratoires.

… et sur la forme

Mais outre le débat sur la nocivité, c’est la méthode qui chiffonne le pneumologue. « C’est une opération de lobbying très organisée, une stratégie classique de l’industrie du tabac, s’agace-t-il. Depuis des décennies, ils font tout pour semer la confusion et continuer à vendre leurs produits. Depuis le 11 juillet 2017, tous les acteurs de la lutte contre le tabac impliqués dans le domaine de la réduction des risques reçoivent une lettre recommandée de British American Tobacco, le cigarettier le plus agressif, les invitant soi-disant au dialogue ».

Une méthode qui déplait au Pr Dautzenberg et sans doute à nombre de ses collègues, mais aussi dénoncée par la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la Santé sur la lutte antitabac (FCTC). Ses textes prévoient en effet de limiter les interactions entre les acteurs de la lutte antitabac, législateurs et experts, et les industriels.

Une résolution pas toujours respectée, au regard des courriers de BAT ou des tentatives d’approches désespérées des lobbyistes de Philip Morris. Mais les cigarettiers ne semblent pas s’en émouvoir. Le coup de sang du Pr Dautzenberg incitera peut-être ses confrères et consœurs à réagir dans des cas d’approche similaires.