Sur la scène sanitaire médiatique, les nanotechnologies, que tout le monde redoutait il y a de cela quelques années, ont laissé place aux perturbateurs endocriniens. Pourtant, les inquiétudes n’ont pas été levées.
Le 12 juillet dernier, huit associations* ont adressé une lettre ouverte aux membres du gouvernement, réclamant que des actions soient enfin entreprises pour assurer la santé des Français face aux nanomatériaux. Ces ONG participent toutes à un groupe de travail « Étiquetage et restriction des nanomatériaux », piloté par le ministère de l’Environnement.
Et depuis deux ans que le groupe se réunit, peu a été fait. « Nous formulons, sur la base de considérations scientifiques, des recommandations concernant l’étiquetage et la restriction des nanomatériaux dans les produits de consommation… sans résultat tangible à ce jour, ni signal clair d’une volonté de prendre des mesures concrètes à court terme », dénoncent les associations dans leur lettre.
Ils sont partout
« Pourtant, nous sommes tous exposés, le plus souvent sans le savoir », rappellent-elles. Produits de beauté, vêtements, aliments, médicaments, détergents… « Chaque année en France, près de 500 000 tonnes de nanomatériaux sont importées ou fabriquées sur le sol national ».
Pourtant, des faisceaux d’indices scientifiques convergent vers une confirmation de la dangerosité de certains produits. En particulier, l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) ont confirmé cette année le potentiel cancérogène des nanoparticules de dioxyde de titane contenues dans le colorant E171, utilisé dans l’alimentation, les produits d’hygiène ou encore les médicaments.
Trois mesures phare
Face à ces risques et à l’immobilisme du côté de la règlementation, les associations réclament la mise en place d’une « stratégie nationale sur les nanomatériaux. Si la recherche d’un consensus est louable, l’ériger en principe conduit à ne rien faire… et donc à favoriser la position d’un groupe d’acteurs minoritaires, les fabricants de nanomatériaux, au détriment de la protection de la santé humaine et des écosystèmes. »
Elles réclament trois mesures. En priorité, l’interdiction temporaire des nanoparticules de dioxyde de titane du colorant E171, et la création d’une « procédure plus générale d’autorisation de mise sur le marché des nanomatériaux en France ». À terme, les nanomatériaux ne pourraient donc plus être utilisés à grande échelle dans des biens de consommation courante en contact avec le corps humain. Du moins, pas sans avoir prouvé leur innocuité pour l’homme et l’environnement, ou leur utilité.
Les ONG demandent également que l’information soit mise à disposition du consommateur, via un étiquetage précis mentionnant l’utilisation de nanomatériaux. Et enfin, que soit assurée la traçabilité des produits.
(*) Center for International Environmental Law (CIEL), Association de veille et d’information civique sur les enjeux des nanosciences et des nanotechnologies (AVICENN), France Nature Environnement (FNE), Familles de France (FDF), Agir pour l’Environnement (APE), Women Engage for a Common Future France (WECF France), Comité pour le Développement Durable en Santé (C2DS), Centre d'Information sur l'Environnement et d'Action pour la Santé (CIEAS).