Peu de médicaments sont tolérés pendant la grossesse, et les traitements doivent souvent être adaptés. Mais parfois, l’arrêt thérapeutique n’est pas possible. En Europe, entre 3 et 8 % des femmes prennent par exemple des antidépresseurs pendant leur grossesse. Des chercheurs de l’université de Bristol (Royaume-Uni) ont cherché à savoir si ces traitements pouvaient induire un risque d’autisme chez l’enfant, sachant que ces molécules passent la barrière placentaire.
Leurs conclusions, publiées ce mercredi dans le BMJ, sont très prudentes. Statistiquement, ils ont observé que les femmes traitées avaient un risque légèrement plus élevé d’avoir un enfant autiste que les femmes avec des antécédents psychiatriques mais ne recevant pas de traitement. La différence reste cependant faible, et pourrait s’expliquer, au moins en partie, par d’autres facteurs.
1 enfant sur 25
Cette étude reposait sur l’analyse de plus de 250 000 jeunes âgés de 4 à 17 ans, dont plus de 5 000 présentent des troubles du spectre autistique (TSA). Un peu plus de 3300 enfants avaient été exposés à des antidépresseurs in utero, et parmi eux, 4,1 % ont développé des TSA. Le chiffre paraît élevé, mais il ne l’est pas tellement plus que chez ceux qui n’ont pas été exposés, mais dont les mères avaient un passé psychiatrique. Dans cette population, la prévalence de l’autisme est de 2,9 %. Pour la population générale, le risque est d’environ 1 %.
L’analyse des chercheurs a donc montré une différence statistiquement significative de 1,2 points associée à la prise d’antidépresseurs. Mais elle ne leur paraît pas suffisante pour conclure quant à un risque particulier.
« Le fait qu'une association existe entre les deux phénomènes ne prouve pas qu'il y a un lien de causalité, commente pour Science media centre le Dr Michael Bloomfield, chercheur en psychiatrie à l’University College London. Il peut y avoir une multitude d'autres explications. »
Pas d’intérêt à l’arrêt des traitements
Il est par exemple possible que ces chiffres soient biaisés par la gravité de la dépression de la mère : celles qui souffrent moins interrompent peut-être plus facilement leur traitement, et ont peut-être par ailleurs moins de risque d’avoir un enfant autiste que les femmes plus sévèrement touchées.
Et, tant que ne seront pas maîtrisés les mécanismes biologiques régissant le développement des TSA, il sera difficile d’en savoir plus, estiment les chercheurs qui ont réalisé l’étude.
Dans tous les cas, même si l’association entre les deux venait à être confirmée, la différence observée n’est pas suffisante pour susciter l’inquiétude. « Si plus aucune femme enceinte ne prenait d’antidépresseurs, le nombre de cas qui pourraient être prévenus serait faible », concluent les chercheurs dans les colonnes du BMJ.