Plus de 90 % de la population française consomment de l’eau du robinet chlorée. Ce procédé de désinfection de l’eau est l’une des principales avancées de santé publique du XXe siècle. Mais elle ne serait pas sans conséquence pour la santé humaine.
La réaction du chlore avec certaines substances présentes dans l’eau engendrerait des trihalométhanes (THM) qui favoriseraient l’apparition du cancer de la vessie, rapportent deux études de Santé publique France.Ces substances indésirables sont de 4 types : le bromoforme, chloroforme, dibromochlorométhane et bromodichlorométhane. Les chercheurs de l'agence sanitaire ont évalué l’exposition de la population française à ces substances entre 1960 et 2000.
18 % des cancers de la vessie
Ils estiment l’exposition moyenne actuelle de la population française est de 11,7 μg/L contre 17,3 μg/1 dans le passé. La limite de qualité est fixée à 100 μg/L. Néanmoins, ils ont constaté que l’exposition n’est pas homogène sur le territoire. Si « la population alimentée par des eaux de surface est deux fois moins exposée que par le passé », elle reste « deux fois plus exposée que la population alimentée par des eaux souterraines », notent-ils.
Des études ont montré que plus la concentration en THM est élevée, plus le risque de cancer de la vessie est important. Aussi, les chercheurs estiment-ils que 18 % des cas de cancers de la vessie seraient attribuables à ces substances toxiques, soit 1 600 cas par an. « Si l’exposition ne change pas, elle serait de 16 % dans le futur », avancent-ils.
Les disparités confirmées
En parallèle, une autre équipe de Santé publique France a étudié l’incidence de ce cancer dans 11 départements entre 1998 et 2011 et a évalué l’exposition aux sous-produits de chloration. L’étude a porté sur plus de 4 420 communes et 18 290 cas de cancers.
Ces travaux confirment cette relation d’exposition-risque, ainsi que les disparités géographiques. « Les eaux souterraines produisent beaucoup moins de THM que les eaux de surface. Les eaux de surface semblent être associées positivement au risque, mais avec une incertitude très forte sur l’amplitude de cette relation », indiquent-ils.
Cependant, les chercheurs concluent qu’il n’y a pas de lien de causalité entre l’exposition à ces substances et le risque accru de cancers de la vessie. Ils jugent que des études toxicologiques et épidémiologiques sont nécessaires pour identifier précisément les substances responsables.