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Maladies nosocomiales

Hygiène : les médecins oublient de nettoyer leur stéthoscope

Par Jonathan Herchkovitch

Les médecins ont fait des progrès sur l’hygiène des mains, mais ne se préoccupent pas assez de celle de leur stéthoscope.

oksun70/Epictura

Dès les années 2000, le problème des maladies nosocomiales, c’est-à-dire les infections que l’on contracte lors d'un séjour à l’hôpital, ont soulevé le problème de l’hygiène du personnel hospitalier. Aides-soignants, infirmiers et médecins sont concernés. Depuis, de gros progrès s’observent sur le lavage des mains, et ces maladies sont en recul. Mais beaucoup reste à faire.

Les chercheurs de l’université de Yale (États-Unis) se sont cette fois attaqués au problème du stéthoscope. En observant l’attitude des médecins avant et après une consultation, ils ont remarqué que l’hygiène des mains était plus ou moins bien respectée, mais qu’aucun n’avait eu le réflexe de nettoyer son outil d’écoute.

Zéro pointé

Ils ont pourtant eu l’occasion de sauver l’honneur : les chercheurs ont analysé l’hygiène des médecins sur 170 entrées ou sorties de consultation. Dans 58 % des cas, ils se lavaient les mains avant, avec de l’eau et du savon ou une solution hydroalcoolique. Et dans 63 % des cas, après. Un score plutôt médiocre, mais pas catastrophique : il traduit au moins une conscience des principes de base de l’hygiène hospitalière.

En revanche, sur les 170 observations, pas un seul nettoyage de stéthoscope, quel qu’il soit. Ce qui a étonné les chercheurs eux-mêmes : ils s’attendaient à une hygiène limitée à ce niveau, mais pas inexistante. D’autant plus que la procédure fait partie intégrante de la checklist de l’évaluation des étudiants en deuxième année de médecine de l’institution où a été réalisée l’étude, et que des présentations pédagogiques avaient été effectuées et bien reçues par le personnel soignant.

Les chercheurs reconnaissent que l’étude a quelques limites, notamment dues au fait qu’ils n’étaient pas présents pendant l’examen en lui-même. Ils ne pouvaient donc pas savoir si le médecin avait ou non utilisé son stéthoscope.

« Malgré ces limites, nous pensons que ces résultats mettent en lumière un problème important, mais souvent négligé, de contrôle infectieux, en révélant la pauvreté de l’hygiène des stéthoscopes, expliquent les chercheurs de Yale dans leur article, publié dans la revue American Journal of Infection Control. Cela suggère que l’éducation standard n’est pas la réponse adaptée. Nous pensons que l’hygiène des stéthoscopes devrait être incluse dans toutes les initiatives visant à améliorer l’hygiène des mains dans les hôpitaux. »

Plus sale que des mains

Car ces instruments, en contact avec les mains des praticiens, passent de poitrine en poitrine et de dos en dos, et sont de véritables nids à bactéries. Une étude réalisée aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) avait montré en 2014 à quel point. Il y a plus de bactéries sur leurs membranes que dans la paume de la main des praticiens. Y compris du staphylocoque doré, particulièrement résistant aux antibiotiques et impliqué dans les maladies nosocomiales.

Un stéthoscope individuel est exclusivement destiné aux patients particulièrement fragiles sur le plan infectieux ou contagieux, ce qui prouve que les médecins sont conscients du problème d’hygiène. Et, même si le nettoyage pose un problème matériel, car il abîme progressivement la membrane de l'instrument, l’hygiène doit être prioritaire. Pour ne pas perdre les bénéfices de l’hygiène des mains, les médecins sont vivement encouragés à passer un petit peu de solution hydroalcoolique, ou simplement une lingette désinfectante, sur leur outil de travail. Une prochaine étude s'intéressera-t-elle au problème de la cravate ?