« Drogue des djihadistes », « potion magique de l’Etat islamique »… Le Captagon, un traitement de la narcolepsie, a fait la une des médias après les attentats du Bataclan. Un témoin de l’attaque avait indiqué que les terroristes ressemblaient à des « morts-vivants » et semblaient sous l’emprise de drogue. Très vite, des experts ont évoqué l’usage de ce stupéfiant.
Les autopsies des corps des terroristes n’ont pourtant révélé aucune trace de ce médicament. Ce n’est pas non plus cette drogue qui a poussé les combattants de Daech à commettre les attentats de Bruxelles ou de Londres, relève l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT). Dans un rapport intitulé « Captagon, destruction d’un mythe », il revient sur l’histoire de ce médicament et décrit les relations qu’entretiennent les pays du Golfe Persique avec la molécule.
Une molécule qui n'est plus produite
Commercialisé dans les années 1960, ce psychostimulant est proche des amphétamines. Son principe actif est la fénétylline. Inscrite sur la liste des substances psychotropes des Nations unies en 1986, cette substance n’est plus fabriquée dans le monde depuis 2007 et les stocks mondiaux s’amenuisent.
Les comprimés saisis par les douanes et polices scientifiques en Arabie Saoudite, Irak, Serbie, Liban, Turquie ou Yémen seraient, en fait, des contrefaçons. Ils portent le logo du Captagon originel mais ne contiennent pas la fénétylline. « Ces éléments permettent de le démystifier et d’exposer sa véritable et très prosaïque nature : du ”speed” en ”cachetons” souvent coupés à la caféine », résume le rapport.
Les consommateurs de ces cachets d’amphétamines seraient surtout les Saoudiens et les Koweïtiens. Oman, le Qatar ou encore le Bahreïn feraient également partie des pays consommateurs de ce faux Captagon.
Circuit parallèle
Et les producteurs et fournisseurs ne se trouvent pas très loin. La Jordanie et l’Irak apparaissent comme les plus importants acteurs de ce marché, au vu des quantités importantes de BMK, un précurseur légal des amphétamines, officiellement importées. Cette molécule est notamment utilisée dans les détergents. Or au moment où la guerre en Syrie a éclaté, les produits détergents irakiens contenaient 50 % moins de BMK qu’auparavant. Le reste a pu être transformé en cachets d’amphétamines, suggère l’OFDT.
Des laboratoires clandestins ont également été identifiés dans des zones sous contrôle du régime syrien, ou d’un groupe affilié à Al-Qaïda. Dans un rapport de 2016, l’ONG Global Initiative against Transnational Organized Crime excluait toutefois toute implication de l’Etat islamique dans la production ou le trafic de cette drogue.
Pour l’OFDT, la conjugaison de ces faits et évènements « a contribué à alimenter une série de rumeurs et d’allégations » autour de l’usage du Captagon dans les rangs de Daech. Aujourd’hui, aucun élément objectif et solide ne montre que les djihadistes se dopent au Captagon, conclut-il.