C’est une première aux États-Unis. Des chercheurs de l’université de l’Oregon seraient parvenus à modifier l’ADN de nombreux embryons, en utilisant la technique des « ciseaux moléculaires » CRISPR, d’après le MIT Technology Rewiew.
Si ce n’est pas une première mondiale, une équipe chinoise avait déjà tenté l’expérience, mais avait échoué là où les Américains semblent avoir réussi. L’utilisation de CRISPR n’avait pas donné les résultats escomptés, notamment parce que la technique n’avait pas agi sur toutes les cellules de l’embryon. Ce qui avait laissé planer le doute sur les risques liés à l’utilisation des ciseaux moléculaires.
Des freins éthiques
Mais cette fois, l’équipe américaine de Shoukhrat Mitalipov, un biologiste américain d’origine kazakhe mondialement reconnu, serait parvenue à montrer qu’il est possible d’éviter à la fois ce « mosaïcisme » génétique, et les modifications d’ADN hors-cible, c’est-à-dire les dommages collatéraux sur l’ADN. Les chercheurs auraient ainsi modifié plusieurs dizaines d’embryons, détruits après quelques jours de développement, comme la législation l’impose pour l’instant.
Jusqu’à présent, personne n’avait encore osé s’attaquer à un sujet aussi sensible Outre-Atlantique, notamment en raison des limitations éthiques. Mais un rapport de l’Académie des sciences américaine publié cette année avait ouvert une porte, étroite, aux recherches sur la modification de l’ADN des embryons, sous des conditions très strictes. Il fallait, en particulier, que ces modifications aient pour but l’élimination d’une maladie, et non l’amélioration ou la modification de certaines caractéristiques.
« L’édition du génome destinée à améliorer des traits ou des capacités au delà de la normale soulève des questions sur le rapport entre les bénéfices et les risques qui y sont liés, et sur l’équité, si seulement quelques personnes y ont accès », avait notamment déclaré Alta Charo, professeur de droit et de bioéthique à l’université du Wisconsin, et membre du comité de l’Académie des sciences.
Des pathologies graves
Il semblerait que cet avis ait été respecté. Les travaux de Soukhrat Mitalipov et de son équipe, qui devraient être publiés sous peu dans une revue scientifique, se sont concentrés sur la réparation de défauts génétiques liés à des maladies, comme la bêta-thalassémie, une maladie de l’hémoglobine. D’autres pathologies auraient été ciblées, mais Mitalipov et ses collègues n’ont pas souhaité communiquer plus de détails.
« Je ne pense pas que nous en soyons déjà aux essais cliniques, mais les résultats sont plus avancés que tout ce qui a été réalisé auparavant », estime une source proche du projet, citée par le MIT technology review.
En France, l’Académie nationale de médecine a adopté en 2016 une position favorable au développement de recherches utilisant CRISPR, même sur l’embryon humain. En revanche, la législation française interdit « toute intervention sur la structure de l’ADN ayant pour conséquence de modifier le génome de la descendance ».