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Neurologie

L'inattendu est beaucoup moins surprenant pour les patients autistes

Par Jonathan Herchkovitch

Les troubles du spectre autistique modifient la perception de l'environnement. Les patients surestiment les probabilités que l'improbable se produise.

Dubova/Epictura
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Imaginez que vous ouvrez votre tiroir à chaussettes, et que vous y trouvez un ananas. La trouvaille est surprenante. Ajoutez maintenant à la situation un enfant en bas âge qui joue dans la chambre. La présence d’un fruit dans les vêtements est tout de suite un peu moins étonnante, car l’enfant augmente les probabilités d’événements inattendus.

Ses actions nuisent à la bonne compréhension du lien entre la présence d’un tiroir à chaussettes, et son contenant probable, c’est-à-dire des chaussettes. C’est ainsi que des chercheurs de l’University College de Londres (UCL) ont imagé les difficultés de compréhension qu’éprouvent les personnes avec un trouble du spectre autistique (TSA) face à ce qui les entoure.

Instabilité extérieure

Une expérience qu’ils ont menée sur une cinquantaine de personnes, dont la moitié souffraient de TSA, a en effet montré que les autistes surestimaient l’inconstance de leur environnement. Pour eux, pas besoin de la présence d’un enfant pour bouleverser les probabilités. Ce qui pourrait expliquer une partie de leurs symptômes, notamment concernant leur intolérance au changement.

« L’idée d’un lien entre la construction des attentes visuelles différente chez les autistes et leurs difficultés sociales est une possibilité intrigante », explique Geraint Rees, professeur de neurologie cognitive à l’UCL, et l’un des auteurs de l’étude publiée dans Nature Neuroscience.

Une association claire

Les chercheurs britanniques ont proposé une expérience consistant à faire apprendre un schéma classique d’événements : les participants entendaient un son – soit grave, soit aigu –, suivi d’une image liée au son. Par exemple, un son aigu était suivi d’une photo de maison, et un son grave d’un visage. Pour créer un événement inattendu, il suffisait de présenter un visage après un son aigu.

Pour évaluer leur réaction à ce changement, ils ont observé le comportement des participants et la dilatation de leurs pupilles. Lorsque des événements imprévus intervenaient, les personnes atteintes de TSA réagissaient moins que les autres. Et plus les symptômes étaient sévères, moins la réaction était importante.

Un début d’explication

« Lorsque l’incertitude gagne nos propres croyances, par exemple lorsque les circonstances sont volatiles, nous nous en remettons plus à nos sens qu’à nos prévisions, explique le Dr Rebecca Lawson, neuroscientifique et auteure principale de l’étude. Si les personnes autistes font plus souvent face à cette inconstance, cela pourrait expliquer leur propension à la surcharge sensorielle, leur fonctionnement perceptuel et leur insensibilité au contexte. »

Les résultats de l’UCL pourraient au moins apporter un éclairage sur la manière dont les personnes souffrant de TSA perçoivent le monde qui les entoure.