Le virus Ebola réserve encore quelques surprises aux équipes qui l’étudient. L’épidémie qui a fait rage en Afrique de l’Ouest est désormais achevée. Mais deux ans après sa fin officielle, les infectiologues continuent de retrouver ses traces dans l’organisme des survivants. Plus précisément dans le sperme d’hommes qui ne présentent plus de symptômes, comme le montre une étude parue dans Open Forum Infectious Diseases.
Parmi les patients qui ont survécu au virus, à l’origine d’une fièvre hémorragique grave, plusieurs centaines sont suivis dans le cadre d’études scientifiques. Ici, les chercheurs de l’université de Caroline du Nord (Etats-Unis) ont examiné les fluides biologiques de 149 Libériens.
Des survivants en mauvais état
Le sperme de 13 de ces volontaires présente des traces détectables d’ARN appartenant au virus Ebola. Onze d’entre eux n’avaient pas présenté de symptômes depuis deux ans. Détail plus surprenant : certains hommes avaient livré des résultats négatifs lors de prélèvements précédents. Sans que les spécialistes puissent l’expliquer.
Quelques caractéristiques distinguent les survivants chez qui Ebola persiste. Plus âgés en moyenne, ils se plaignent plus souvent de douleurs et de troubles visuels. Rien d’étonnant à cela, puisque les trois quarts des patients souffrent de problèmes de santé alors que les symptômes ont disparu.
Les troubles visuels sont également fréquents chez les personnes qui ont survécu au virus. Une étude a même signalé que ceux-ci présentent des lésions au niveau de la rétine, qui constitue une zone de repli pour Ebola.
De nombreuses interrogations
A la manière des yeux, le sperme pourrait constituer un abri idéal pour le virus. Mais les conséquences d’une telle persistance ne sont pas encore connues. Ebola peut-il se réactiver plusieurs années après son introduction ? L’ARN viral peut-il contaminer d’autres personnes ?
La question se pose, étant donné que des cas de transmission sexuelle ont été documentés, tout comme des réactivations de l’infection. Mais les scientifiques ne savent toujours par si l’ARN est à l’origine de ces contaminations ou si un autre facteur entre en jeu.
Obtenir les réponses à ces interrogations est crucial, selon les chercheurs américains. Et pour cause : l’épidémie qui a eu lieu de 2013 à 2016 a infecté 30 000 personnes. Le réservoir potentiel est donc énorme.
Mais pour William Fischer, qui co-signe ces travaux, de telles observations doivent surtout faire évoluer la perception d’Ebola. « Ce n’est pas seulement une maladie aiguë, elle peut avoir des effets à long terme, avertit-il. Il devient clair que, chez certains survivants de sexe masculin, le virus peut persister dans les voies génitales sur de longues périodes. »
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) elle-même devrait prêter un œil attentif à ces résultats. En 2016, l’agence sanitaire a recommandé aux survivants de s’abstenir de tout rapport sexuel pendant 12 mois, ou d’utiliser des préservatifs, tant que les tests ne sont pas négatifs. La date pourrait bien être repoussée, au vu de ces nouvelles données.