Les pistes thérapeutiques se multiplient pour les « enfants vieillards ». Ces jeunes patients, atteints de progéria, subissent un vieillissement accéléré. Ils meurent souvent avant d’avoir soufflé leurs 15 bougies. La maladie est rarissime, elle touche une naissance sur 10 à 20 millions, mais plusieurs équipes s’acharnent à allonger leur espérance de vie.
Au rang de celles-ci, les chercheurs du Houston Methodist Research Institute (Etats-Unis), qui tentent d’agir sur la longueur des télomères – un marqueur privilégié du vieillissement. Une première étude sur des cellules de malades a livré de bons résultats, comme ils l’expliquent dans le Journal of the American College of Cardiology.
14 ans d'espérance de vie
La progéria, aussi connue comme le syndrome de Hutchinson-Gilford, est d’origine génétique. A cause d’une mutation sur le gène LMNA, les protéines chargées d’assurer l’intégrité du noyau des cellules ne fonctionnent pas bien. L’une d’entre elles, la progérine, est particulièrement toxique, et s’accumule dans le noyau des cellules dès le plus jeune âge – alors qu’elle n’apparaît normalement qu’à un âge avancé.
Les malades souffrent donc d’un vieillissement accéléré, qui se traduit par des symptômes marqués. Perte de cheveux, troubles cardiovasculaires, rides profondes sont autant de signes qui valent aux patients leur surnom : les enfants vieillards.
« Ces enfants meurent d’une crise cardiaque ou d’un AVC à 13, 14 ou 15 ans, indique John Cooke, auteur de cette étude. Les traitements actuels sont utiles, mais n’allongent l’espérance de vie d’un enfant que d’une année ou deux. » Son équipe a donc expérimenté une nouvelle approche : rajeunir les cellules, dans l’espoir de limiter les manifestations de la progéria.
Rallonger les télomères
Les Américains ont tourné leur regard vers les télomères, ces morceaux d’ADN non-codant situés à l’extrémité des chromosomes, ce qui les protège de dégâts et mutations. Lors d’un vieillissement normal, ils se raccourcissent avec l’âge, favorisant l’apparition de pathologies et la réduction de l’espérance de vie.
Le même processus se produit chez les patients souffrant du syndrome de Hutchinson-Gilford, mais de manière démultipliée. Sur les 17 malades dont les cellules ont été analysées, 12 avaient des télomères fortement raccourcis. Ils étaient comparables à ceux d’une personne sans mutation âgée de 65 ans.
Ce constat posé, les scientifiques ont développé une hypothèse : et si rallonger les télomères permettait d’améliorer le fonctionnement des cellules ? Afin de vérifier cette théorie, l’équipe a utilisé des cellules de malades et leur a fait subir une sorte de thérapie génique, appelée thérapie de l’ARN.
Researchers Develop Technology to Make Aged Cells Younger from Houston Methodist on Vimeo.
Le vieillissement inversé
En laboratoire, les cellules atteintes de progéria ont reçu de l’ARN qui permet de synthétiser la télomérase, une protéine qui rallonge les télomères. L’objectif était de stimuler sa production. Et l’approche a été couronnée de succès. En quelques jours, la durée de vie et le fonctionnement des cellules malades se sont améliorés.
« Nous ne nous attendions pas à observer un effet si marqué sur la capacité des cellules à proliférer, se félicite John Cooke. Elles sont parvenues à fonctionner et à se diviser de manière plus normale, et elles fonctionnaient mieux. »
Les marqueurs cellulaires du vieillissement s’améliorent aussi. Au sein d’un patient, une telle méthode pourrait donc faire reculer les symptômes lourds de la progéria. Et offrir un mécanisme complémentaire aux autres traitements à l’essai.
En effet, des équipes – notamment françaises – développent en ce moment des traitements de la progéria, mais ne ciblent pas les télomères. Elles tentent de lutter contre l’accumulation de progérine dans les cellules ou d’inhiber sa production. Ce qui fonctionne en partie, puisque l’efficacité de la metformine a été confirmée chez des patients et une nouvelle molécule a livré des résultats intéressants.