Les enfants élevés par des parents homosexuels ont-ils une identité genrée modifiée ? La question a été souvent soulevée, parfois instrumentalisée par les opposants au mariage pour tous. A tort, visiblement.
Selon une étude menée sur 106 couples ayant adopté un enfant et publiée dans la revue Sex Roles, il n’y aurait pas de différence d’identité concernant le genre entre les enfants issus de couples homosexuels et ceux élevés par des parents hétérosexuels.
Pour parvenir à cette conclusion, les auteurs, de l’Université de Kentucky, ont suivi des couples homosexuels (gays et lesbiens) et hétérosexuels ainsi que leurs enfants pendant dix ans. Les enfants ont été interrogés et leur comportement a été analysé par les chercheurs – alors que les études précédentes s’étaient attelées à interroger les parents, et non les enfants eux-mêmes.
Poupées et camions
Les auteurs ont passé en revue plusieurs critères permettant d’évaluer l’adoption par les enfants des normes sociales du genre. Parmi ces critères figurent le choix des jouets, des habits ou encore des ambitions professionnelles.
Or, les résultats montrent que la sexualité des parents n’a pas d’influence sur la manière dont l’enfant construit son identité de genre. Par exemple, les petites filles de couples homosexuels jouaient pour la plupart aux poupées et les garçons, aux camions, à l’image des enfants adoptés par des parents hétérosexuels. Difficile de dire s’il faut s’en réjouir, ce n’est d’ailleurs pas le propos de l’étude.
En tout cas, les quelques enfants qui manifestaient des comportements moins conformes à leur genre avant d’entrer à l’école étaient aussi ceux qui aspiraient, quelques années plus tard, à des carrières moins typiques de leur genre. Ce qui montre que le choix des jouets constitue un indicateur plutôt pertinent de la manière dont les enfants s’identifient aux normes sociales du genre, expliquent les chercheurs.
Une affaire d'éducation
« L’orientation sexuelle des parents et la structure familiale n’avaient aucun impact significatif sur la conformité ou la non-conformité des enfants à leur genre, écrivent les auteurs. Nos résultats suggèrent que le développement de l’identité de genre chez les enfants adoptés par des parents lesbiens ou gays s’opère selon des voies habituelles, et est similaire à celui des enfants adoptés par des couples hétérosexuels ».
Ainsi, « le fait d’avoir un modèle féminin et masculin au sein du foyer ne facilite pas nécessairement le développement d’une identité conforme au genre chez les enfants adoptés, pas plus que cela décourage la non-conformité au genre ».
Par ailleurs, les auteurs expliquent que les travaux précédents qui ont conclu à une modification de l’identité de genre chez les enfants ayant été élevés par des coupes homosexuels manifestent certains biais. Elles ont en effet porté sur des familles « non-traditionnelles », alors que ces derniers travaux ont été menés au sein de couples aisés, issus de la classe moyenne et plutôt traditionnels. Ce qui induit que l’identité de genre est bien plus une affaire d’éducation que d’orientation sexuelle.