Marisol Touraine l’avait annoncé, Agnès Buzyn l’a exécuté. Dans un décret paru en juillet, la ministre de la Santé a levé l’interdiction de soins funéraires qui pesait depuis 1986 sur les personnes défuntes atteintes de VIH. En plus du VIH, les hépatites virales ont également été retirées de la liste des maladies ne donnant pas accès à ces pratiques de conservation. Elles y figuraient depuis 1998.
La décision d’interdire les pratiques de conservation à ces personnes avait été prise pour protéger les thanatopracteurs. Le soin en question consiste en une injection de liquide conservateur par voie artérielle. Mais en l’absence de cas de transmission par le biais cette méthode de conservation, la mesure jugée discriminatoire envers les patients séropositifs a été abrogée. L’interdiction prendra fin au 1er janvier 2018.
Incisions
Ce que le Syndicat des Thanatopracteurs condamne. L’organisation a lancé une pétition pour contester la levée de l’interdiction, arguant de risques pour leur santé. « Les soins de conservation sont un procédé invasif, où le risque de piqûre ou coupure est réel, malgré le port des équipements de protection individuelle recommandés. Nous, thanatopracteurs, acceptons de pratiquer des toilettes mortuaires, un acte qui est identique au soin, à l’exception des actes invasifs de conservation (sutures et incisions) et qui permet de se recueillir dans les mêmes circonstances auprès du défunt », écrit le syndicat.
Dans un communiqué conjoint, 20 associations (1) de défense des patients atteints de VIH ou d’hépatites répondent au syndicat et dénoncent « une série de mensonges, contre-vérités et de stigmatisations ». Les signataires rappellent que les discussions, qui ont lieu depuis un an, ont inclus le syndicat lui-même et que les décisions ont été prises en concertation.
"Fausse sécurité"
Par ailleurs, les associations contestent l’argument des thanatopracteurs, selon lequel de simples toilettes mortuaires seraient similaires à un soin de conservation et permettraient aux proches de se recueillir dans les mêmes conditions. « C’est un pur mensonge, et vous le savez très bien. Si cela est effectivement le cas dans les 36 heures qui suivent le décès, la thanatomorphose fait ensuite son œuvre et l’état du corps n’est plus du tout le même dans les jours qui suivent si des soins ne sont pas réalisés ».
Par ailleurs, les associations rappellent que 25 000 personnes sont porteuses du VIH sans le savoir et que, contrairement à l’aurgument du syndicat, l’absence de cas de transmission lors des soins funéraires n’est pas liée à l’interdiction, mais au respect de conditions d’hygiène « universelles ».
« Cette interdiction, nous l’avions toujours dénoncée pour cette raison : elle entraînait un sentiment de fausse sécurité pour les thanatopracteurs, alors que l’application des précautions universelles pour tous les corps devait être la norme, comme cela est le cas pour tous les patients lorsque sont pratiqués, par des chirurgiens par exemple, des gestes et soins invasifs. Seules des précautions universelles peuvent garantir que vous ne rejoignez pas « la longue et triste liste des contaminés » comme vous l’écrivez odieusement », conclut le communiqué.
(1) Signataires : Act Up-Paris, Act Up Sud-Ouest, Actif Santé, Actions Traitements, AIDES, ARCAT, ASUD, CiGaLes, le Collectif Hépatites Virales (CHV), le Collectif TRT-5, Dessine-moi un mouton, Elus Locaux Contre le Sida, Envie, Nova Dona, Sida Info Service, Sidaction, Sol En Si, SOS Hépatites, SOS homophobie, Transhépate