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Mycobacterium ulcerans

Une bactérie mangeuse de chair inquiète les Australiens

Par Audrey Vaugrente

Une bactérie mangeuse de chair inquiète les Australiens. Le nombre d'infections a triplé en quelques années. Les traitements antibiotiques sont peu efficaces.

geralditellys/Flickr
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Des plaies béantes qui refusent de se refermer et résistent aux antibiotiques. En Australie, la population se ronge les sangs à cause d’une mycobactérie particulièrement hargneuse. Mycobacterium ulcerans, c’est son nom, fait de plus en plus de victimes dans le pays. Et ses habitants en ont assez. Une adolescente de 13 ans a choisi de ruer dans les brancards.

Auteure d’une pétition postée la plateforme Change.org, Ella Crofts a directement interpellé le ministre australien de la Santé et des Sports, Greg Hunt. Depuis avril, la jeune fille souffre d’une infection liée à cette bactérie. Et les mois de traitements antibiotiques n’y font rien. Le microbe continue de ronger ses chairs.

Des séquelles lourdes

A première vue, la blessure n’avait pourtant rien d’anormal. Tout juste est-elle plus rouge que la normale. Mais en avril, la situation a dégénéré. « Lentement, la plaie s’est aggravée, mon genou est devenu gonflé et enflammé, jusqu’à ce qu’un jour, la peau se perce », explique Ella Crofts.

Cette lente progression résume bien l’aspect pernicieux de Mycobacterium ulcerans, dont l’infection est aussi connue comme l’ulcère de Buruli. Jusqu’à neuf mois peuvent s’écouler avec que l’ulcère ne se forme. Avant cela, aucun symptôme ne permet de repérer l’infection. Le dernier stade met plusieurs mois à apparaître : la peau cicatrise mais laisse de lourdes séquelles cutanées, qui nécessitent souvent une chirurgie réparatrice.


La plaie au genou d'Ella Crofts (Change.org)


Un traitement antibiotique précoce permet d’en limiter les dégâts. Mais une fois que les symptômes se manifestent, il devient très difficile de s’en débarrasser. Malgré six mois de traitement et de suivi renforcé, la jeune Ella est toujours porteuse de la bactérie qui détruit son genou. Antony Fleming, dont l’histoire est racontée par ABC News, enchaîne lui aussi les antibiothérapies.

159 cas signalés

Si les Australiens se montrent si inquiets, c’est parce que Mycobacterium ulcerans semble particulièrement à son aise dans leur pays. Cette mycobactérie surtout présente sur le continent africain. Jusqu’ici, elle se faisait rare sur la plus grande île du monde.

En 2014, seuls 47 cas ont été signalés, principalement dans l’Etat de Victoria, plus particulièrement sur la péninsule de Mornington. Celle-là même où vivent Ella Crofts et Antony Fleming.

 

 

Le problème, c’est que la bactérie a pris de l’ampleur. « Elle devient de plus en plus courante, reconnaît le Pr Tim Stinear, microbiologiste australien interrogé par ABC News. Nous sommes confrontés à une épidémie. » De fait, les cas sont trois fois plus nombreux qu’en 2014. Depuis le début de l’année, 159 infections ont été détectées.

Pourquoi ? C’est justement la question soulevée par Ella Crofts, à laquelle aucune réponse n’est donnée. Les spécialistes évoquent bien deux pistes – mais elles n’ont rien de certain. Mycobacterium ulcerans réside dans les excréments d’opossum, et elle pourrait être transmise par les piqûres de moustique. Encore faut-il le démontrer.

Des financements arrivent

Mais la recherche est rare autour de Mycobacterium ulcerans. Il faut dire que cette infection, survenant principalement dans des pays pauvres, intéresse assez peu. A croire que 2 000 nouveaux cas en 2015 ne suffisent pas à motiver.

Le ministre de la Santé a pourtant saisi la balle au vol. « J’ai demandé au médecin hygiéniste en chef de travailler avec la Victoria pour développer la recherche », a déclaré Greg Hunt. Plus de 2 millions de dollars ont déjà été fournis à cette fin.

En attendant, les Australiens devront faire preuve de patience… et de prudence. Car à l’heure actuelle, l’ulcère de Buruli ne peut pas être prévenu. Quelques mesures permettent toutefois d’éviter que la mycobactérie n’entre sous la peau. Eviter les piqûres de moustique, par exemple, et désinfecter systématiquement les plaies. Une rougeur persistante doit aussi pousser à consulter un médecin.