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Virades de l'espoir

Mucoviscidose : les pistes thérapeutiques se multiplient

Par Anne-Laure Lebrun

Bien qu'aucun traitement actuel ne permet de guérir les patients, la recherche a ouvert  plusieurs pistes thérapeutiques sérieuses. 

alexraths/epictura

La mucoviscidose n’est plus une pathologie pédiatrique. Aujourd’hui en France, sur les 7 000 malades, plus de la moitié sont des adultes. Un allongement de l’espérance de vie rendu possible grâce aux avancées thérapeutiques.
« Cela suppose de soutenir la recherche pour qu’elle puisse progresser encore plus vite. Tel est le combat de Vaincre la Mucoviscidose », s’enthousiasme Pierre Guérin, le président de l’association à l'occasion des Virades de l’Espoir.

Un combat qui porte ses fruits chaque jour. « On vit ces dernières années, et en particulier ces derniers mois, un développement très important de la recherche clinique », assure à Pourquoidocteur Paola De Carli, directrice scientifique de Vaincre la mucoviscidose.


Des médicaments pour certains malades

L’un des plus récents aboutissements est l’Orkambi (une combinaison de lumacaftor et d’ivacaftor) soumis à une autorisation temporaire d’utilisation depuis décembre 2015. « Ce médicament n’est pas encore officiellement commercialisé car son prix n’a pas encore été fixé, mais les patients y ont accès et c’est le plus important », note Paola de Carli.

Cette bithérapie s’adresse aux patients de plus de 12 ans porteurs de 2 copies mutées du gène CFTR – ces patients sont dits homozygotes. Elle permet d’améliorer leur fonction respiratoire en agissant sur la protéine défectueuse responsable de l’inflammation des muqueuses respiratoires mais aussi digestives.

Mais ce médicament ne répond pas à tous les besoins. La mucoviscidose peut être provoquée par plus de 2 000 mutations dans le gène CFTR. Parmi elles, la mutation Delta F508 est la plus fréquente : elle est présente chez 70 % des malades qui possède une seule copie muté (hétérozygote), et chez 50 % des patients homozygotes. L’Orkambi s’adresse à ces derniers.

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Paola de Carli, directrice scientifique de Vaincre la mucoviscidose : « C'est une très bonne nouvelle par rapport à Orkambi...»


Forte concurrence entre les labos

Pour les patients hétérozygotes, il n’existe pas encore de médicament correcteur de CFTR. Mais cela pourrait changer courant 2018. « Un laboratoire a développé une combinaison d’ivacaftor et de tézacaftor et a déposé, fin août, un dossier d’autorisation de mise sur le marché auprès de l’Agence du médicament américaine et européenne », a expliqué la biologiste.

D’autres candidats-médicaments sont en cours de développement. Il s’agit de nouvelles combinaisons avec des produits connus mais aussi de toutes nouvelles molécules. « Et ces traitements sont développés par plusieurs laboratoires différents. Pour les patients, cette concurrence est une bonne nouvelle car elle pousse les industriels à aller plus vite », glisse Paola de Carli.

Lutter contre les infections

Autres piste de recherche foisonnante : les traitements symptomatiques. En raison de l’excès de mucus dans les bronches, les malades sont à haut risque d’infections respiratoires. Staphylococcus aureus (staphylocoque doré), Haemophilus influenzae ou encore Pseudomonas aeruginosa aiment tout particulièrement se tapir dans ce milieu. Or, ces bactéries sont très souvent résistantes à de nombreux antibiotiques, et peuvent entraîner de graves complications chez les patients. Prévenir ces infections est donc une priorité. Un essai clinique de phase 1 mené par une équipe française vient d’ailleurs de démarrer pour tester l’efficacité d’une nouvelle molécule.

 

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Paola de Carli : « L'association est très investie dans la recherche sur les phages...»

 

D’autres chercheurs tentent de réduire l’atteinte gastro-intestinale. Environ 85 % des patients souffrent d’une insuffisance pancréatique. Alors aux Etats-Unis, des essais tentent de cibler les enzymes pancréatiques. Pour l’heure, aucun essai n’est en cours en Europe.

Malheureusement aucun de ces médicaments ne peut guérir les malades aujourd’hui. Ils ne font que ralentir la progression de la maladie, mais de plus en plus le traitement de cette maladie génétique se personnalise.
« Pour nous, la guérison reste bien sûr l’objectif principal. Mais nous sommes conscients que cela va prendre du temps et que cela nécessite encore beaucoup de recherche. La priorité est donc d’écouter les besoins des malades et d’essayer d’y répondre le mieux possible », résume Paola de Carli.

Les adultes confrontés à d’autres maladies

Alors qu’ils ont réussi à prendre le pas sur la maladie et atteindre la trentaine, les malades de la mucoviscidose sont confrontés à des complications liées à leur maladie. Environ 10 % des malades adultes développent un diabète insulinodépendant, aussi appelé diabète sucré.

Il apparaît en raison de la destruction du pancréas, inhérente à la mucoviscidose. Au fil des ans, les cellules productrices d’insuline disparaissent, et la glycémie grimpe. Dans le cas de la mucoviscidose, le diabète peut aggraver les symptômes respiratoires et favoriser les infections bactériennes. « Cette forme particulière nécessite une prise en charge adaptée des malades », souligne Paola de Carli.

Avec l’allongement de l’espérance de vie, les médecins se sont également aperçus que les malades sont plus à risque d’ostéoporose. La perte de la densité osseuse les rend plus vulnérables aux fractures, notamment des vertèbres. Les experts suggèrent que l’atteinte digestif pourrait entraîner une malabsorption de la vitamine D. Les traitements par corticoïdes, la sédentarité ou encore la silhouette fluette des malades peuvent également avoir des retentissement osseux.