Le métro, plus écolo que la voiture ? Sur le papier, la réponse est positive. C’est d’ailleurs ce que martèle le ministère de la Transition écologique et solidaire, à l’occasion de la Journée du transport public du 16 septembre. Mais la réalité est plus nuancée. Et la CFDT l’a rappelé lors d’une action organisée à la gare du Nord (Paris).
Dans les couloirs de la station parisienne, les tracts sont critiques. « Le 28 juin, entre 17 heures et 18 heures, vous avez respiré 380 microgrammes de particules fines par mètre cube d’air à la station Les-Halles », alertent-ils. Le document, révélé par Le Monde, a été rédigé par la Fédération générale des transports-environnement (FGTE), en s’appuyant sur des données publiques.
Un dépassement systématique
La loi est claire. L’exposition aux particules fines (PM10) ne doit pas dépasser 50 microgrammes par mètre cube d’air. Ces seuils ne peuvent être excédés que 35 jours par an au maximum. En moyenne annuelle, le plafond est fixé à 40 μg/m3. Ce qui n’est que rarement respecté.
Mais dans les souterrains du métro et du RER, les mesures dépassent les limites. Et de loin. D’après les données publiques de la RATP, la concentration en PM10 excède presque systématiquement les valeurs réglementaires. Rien que pour la station Auber, sur le RER A, le taux est établi à 99 μg/m3 sur la journée du 28 juin. Soit plus qu’en surface.
A l’origine de cette pollution, la qualité de l’air extérieur. Mais s’y ajoutent des facteurs spécifiques aux transports publics. Les PM10 sont « émises pour l’essentiel par les systèmes de freinage historiques des matériels roulants », explique la RATP sur son site.
48 000 décès par an
Après la fermeture du métro, c’est encore pire. « Les travaux nocturnes posent problème. Les compresseurs fonctionnent, tout comme les groupes électrogènes qui fonctionnent à l’essence, explique Patrick Rossi, secrétaire fédéral en charge de la santé au travail à la CFDT. La nuit, les taux de particules fines vont jusqu’à 800 mg/m3. C’est inquiétant. »
Et ces mesures nocturnes révèlent bien le cœur du problème. Car si ces résultats sont alarmants pour les usagers, ils le sont encore plus pour les salariés de la RATP et de la SNCF. Pour eux, « c’est toute la journée, toute l’année, 7 à 8 heures par jour et ce, 220 à 230 jours par an, pendant 35 ou 40 ans », chiffre Patrick Rossi.
L’exposition est donc chronique. Or, on le sait, les particules fines favorisent les maladies cardiovasculaires ou encore l’aggravation des pathologies respiratoires. 48 000 Français meurent de la pollution atmosphérique chaque année. 4 800 d’entre eux sont des salariés, rappelle la CFDT. Mais ceux-ci sont moins bien protégés.
De multiples rapports
C’est le code du travail qui régit les seuils d’exposition limites des employés. Et celui-ci se montre très coulant. « Un salarié dans un espace confiné peut être exposé pendant 8 heures à 5 000mg/m3 de PM10 », détaille Patrick Rossi. C’est largement supérieur aux plafonds fixés pour les usagers des transports publics. « Ce n’est plus adapté aux connaissances que nous avons », déplore le syndicaliste.
Si le problème est avéré, les solutions tardent à être apportées. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a publié une étude à ce sujet en 2015. Ses conclusions : les efforts de prévention doivent être poursuivis, et une étude sur les effets à long terme est nécessaire.
« On est en attente du rapport final de l’Anses pour que le ministère de Travail fasse évoluer la valeur limite d’exposition professionnelle », reconnaît Patrick Rossi. Mais la CFDT s’impatiente. Elle n’exclut pas de saisir à nouveau le Conseil d’Etat.
Améliorer les mesures
Face à ce constat, les solutions abondent. « La partie syndicale porte sur la protection des salariés et les départs anticipés à la retraite, parce qu’on sait pertinemment que cette exposition réduit l’espérance de vie », résume Patrick Rossi. Mais les aménagements doivent aussi évoluer, afin de réduire la pollution de l’air dans les couloirs du métro.
La RATP travaille justement à une qualité de l’air plus optimale. « Les efforts portent à la fois sur l’amélioration du renouvellement d’air des espaces (…) et sur l’optimisation du freinage électrique des matériels roulants », signale l’entreprise. La CFDT demande que l’attention soit portée sur les travaux nocturnes. Mais sur le fond, c’est surtout une question d’égalité entre les travailleurs et les usagers.