Il a 28 ans, elle en a 11. Un homme est accusé d’avoir imposé une relation sexuelle à une fillette. Pourtant, le parquet de Pontoise (Val-d’Oise) n’a pas retenu a qualification de viol ; l’homme est poursuivi pour « atteinte sexuelle ». Les magistrats ont estimé que la jeune fille, ayant donné son accord, avait consenti à la relation sexuelle.
Mais que vaut le consentement sexuel d’un enfant de 11 ans face à un adulte ? La requalification du viol en atteinte sexuelle indigne les pédopsychiatres. Ce, d’autant plus qu’une telle démarche risque de sérieusement nuire à la reconstruction de la victime, comme l’explique le Dr Xavier Pommereau, pédopsychiatre, chef du Pôle aquitain de l'adolescent au CHU de Bordeaux.
En 2017, peut-on considérer les enfants de 11 ans comme sexuellement consentants ?
Dr Xavier Pommereau : Bien sûr que non. Même si l’on peut considérer qu’il existe des variations en fonction de l’origine ethnique – dans certaines situations, les jeunes sont mûrs plus vite – pour ce qui est de notre pays, les adolescents, avant 14 ans, sont des jeunes gens pour lesquels on ne peut pas parler d’accord et de consentement quand ils sont soumis à la pression d’un adulte.
D’un point de vue pédopsychiatrique, l’accord d’un enfant sollicité par un adulte n’a pas de recevabilité homologable, quand bien même on dirait que l’enfant adhère à cette sollicitation. A 12 ans, on ne peut pas être considéré comme consentant et comprenant tout le sens d’une sollicitation sexuelle.
Le fait de ne pas reconnaître le statut de viol risque-t-il de nuire à la reconstruction des jeunes victimes ?
Dr Xavier Pommereau : Bien sûr. Reconnaître le statut de victime d’un viol est une étape nécessaire à la reconstruction. Il est catastrophique, pour cette jeune fille, de la considérer comme responsable à 11 ans. Le corps social doit donner un cadre et des limites à ses actes. Il faut que cette enfant sache que bien qu’elle ait donné son accord en toute bonne foi, la société estime que cet accord n’est pas valable.
Cela permet de la replacer dans sa catégorie d’âge, et de réduire le sentiment de culpabilité lié au consentement apparent que cette fillette a donné. Sortir de la culpabilité est un élément nécessaire pour se reconstruire après un viol.
La médiatisation de l’affaire peut-elle nuire à la reconstruction de la victime ?
Dr Xavier Pommereau : Pas forcément. La médiatisation de cette affaire montre qu’il y a quelque chose d’anormal dans cette société qui fait d’un enfant de 11 ans une personne sexuellement responsable. Cette médiatisation pourra, espérons-le, faire évoluer les choses. Il existe une lacune dans la législation qui devra être comblée et ce, d’autant plus que le nombre d’abus sexuels sur mineurs semble augmenter.