Nouveauté ne rime pas toujours avec efficacité, à en croire une étude britannique parue dans le British Medical Journal. Ces travaux rapportent que la moitié des médicaments anti-cancéreux commercialisés en Europe entre 2009 et 2013 n’apportent aucun bénéfice aux patients.
L’équipe du King College de Londres (Grande-Bratagne) a analysé toute la littérature scientifique portant sur les 48 molécules mises sur le marché ces dernières années. Toutes ont reçu le feu vert de l’Agence européenne du médicament (EMA).
Or, il apparaît que les experts de l’EMA ne sont pas très exigeants. Les essais cliniques réalisés sur ces différentes spécialités ne suggèrent pas de preuves évidentes d’efficacité. La méthodologie des études est elle aussi en cause. Les chercheurs ont noté qu’une grande majorité des essais ne permettait pas d’apprécier l’impact direct de ces médicaments sur la survie ou la qualité de vie des malades.
Des bénéfices« marginaux »
L’étude indique, par exemple, qu’un tiers des spécialités mises sur le marché au cours de cette période ont démontré une prolongation de la survie des malades. Néanmoins, l’effet est réduit : les patients peuvent espérer vivre entre un et six mois de plus. Pis, seulement sept médicaments ont montré une amélioration de la qualité de vie des malades lors des essais cliniques.
En 2017, les chercheurs ont complété leurs travaux en recherchant des données obtenues en vie réelle sur ces molécules. Plus de trois ans après leur commercialisation, trois spécialités ont montré un prolongement la durée de vie, et sept ont permis une amélioration de la qualité de vie. Reste que ces bénéfices apparaissent « marginaux » lorsque les médicaments sont comparés à un placebo.
Un modèle à revoir
Pour les gouvernements, la pilule devrait avoir du mal à passer. De fait, ces nouveaux médicaments, souvent présentés comme des innovations, coûtent cher au système de santé.
« Les dépenses et la toxicité des médicaments anti-cancer sont telles que nous avons l’obligation d’exposer les patients à des traitements qui vont améliorer la survie ou la qualité de vie des malades, a commenté le Pr Vinay Prasad, professeur à l’université de l’Oregon dans un éditorial publié dans le BMJ, ajoutant que ces résultats suggèrent « que nous somme bien loin de ce standard ».
Dans un autre commentaire, Emma Robertson, une représentante des associations de patients, partage elle aussi son amertume. « Il est clair pour moi et des centaines de malades comme moi que la recherche actuelle et le modèle de développement ont échoué ».