L’antibiorésistance a tout d’une guerre. D’un côté, l’humanité. En développant des antiobiotiques, elle est parvenue, en moins d’un siècle, à diminuer drastiquement le nombre de décès dus aux maladies infectieuses. De l’autre, les bactéries : sous pression, elles mutent et développent des mécanismes de résistance aux antibiotiques. Une vraie course aux armements, où les humains n’ont pas intérêt à prendre trop de retard.
C’est dans cette optique que des chercheurs de l’université de Buffalo (New York) travaillent à mettre au point un nouveau vaccin contre la pneumonie. Responsable de la mort d’un million d’enfants par an (OMS, 2015), la pneumonie est principalement due à une bactérie : le pneumocoque (S. pneumonia). Pour l’heure, les vaccins disponibles permettent de protéger contre au mieux 23 souches de pneumocoques, parmi les plus virulentes.
Large couverture, bonne efficacité
Mais il est à craindre que les souches non ciblées n’en viennent à proliférer, ou que de nouvelles souches antibiorésistantes fassent leur apparition. Or les vaccins existants ont des performances limitées. Les vaccins polysaccharidiques (Pneumo-23, Pneumovax) ont une couverture assez large mais une efficacité réduite, quasi-nulle avant l’âge de deux ans. Quant aux vaccins conjugués (Prevnar-13), ils sont plus efficaces mais leur couverture est plus étroite (13 souches).
Le nouveau vaccin développé à l’université de Buffalo, dit à liposome, a vocation à combiner une grande efficacité et une couverture large. Testé chez l’animal, il a été capable de provoquer une réponse immunitaire vigoureuse sur 72 souches de pneumocoque.
Vaccin à liposome
Contrairement aux vaccins conjugués, qui doivent combiner chaque antigène ciblé à une protéine de portage, les vaccins à liposomes encapsulent tous les antigènes nécessaires dans de minuscules sphères (les liposomes), capables d’amplifier eux-mêmes la réponse immunitaire. Il est donc bien plus aisé et moins coûteux d’ajouter de nouvelles souches au fur et à mesure que le besoin s'en fera sentir.
« Les vaccins traditionnels détruisent complètement les bactéries ciblées », explique Charles H. Jones, co-auteur de l’étude. « Mais avec ce nouveau vaccin en développement, nous pouvons surveiller les bactéries et attaquer seulement si elles se démarquent du microbiote pour causer une maladie. C’est important parce qu’en laissant les bactéries non nocives en paix, nous empêchons que d’autres bactéries nocives prennent leur place. »
Reste à tester et valider ce prototype chez l’homme et, en cas de résultats positifs, à industrialiser sa production. Il faudra encore de nombreuses années pour parvenir à un éventuel produit fini, mais c’est l’espoir d’une nouvelle arme dans la course effrénée qui oppose l’homme à ses hôtes minuscules.