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Pourquoi Docteur s’engage contre la pollution

Rouler ou marcher en ville

Par Dr Eric Du Perret

Depuis dimanche, le C40, le réseau des grandes villes du monde engagées contre le réchauffement climatique, est réuni à Paris. Il y a urgence car les chiffres sont catastrophiques. Pourquoi Docteur a décidé de s’engager dans ce combat contre la pollution et reviendra toute cette semaine sur le dossier épineux de la pollution et des ravages sur notre santé. Aujourd’hui : Pollution et exercice physique

denisismagilov/epictura

Entre les risques d'accident, l'air pourri que l'on respire derrière les pots d'échappement, est-ce que c'est vraiment une bonne idée, le vélo ou le jogging en ville ?

 Dr ED : C’est l’objet d’une vraie polémique entre les médecins. En fait, il y plusieurs réponses. Est-ce que c’est bon en général pour la santé ? Là, c’est indiscutablement oui. Est-ce que c’est dangereux en raison des accidents ? Probablement, surtout si l’on oublie, à vélo, le port du casque qui est vraiment impératif. La pollution risque-t-elle d’être encore plus dangereuse, puisqu’on respire dans l’effort physique jusqu’à dix fois plus d’air qu’à la normale ? C’est là où se situe le débat. Il y a du nouveau qui semblerait démontrer que c’est dangereux pour la santé. Mais d'autres travaux montrent que l'automobiliste est encore plus exposé à la pollution.

 

L’Institut de veille sanitaire (InVS) met en garde contre l’association pollution-pic d’allergie. En ville, cyclistes et joggeurs sont certainement les premiers exposés ?

Dr ED : L’effort physique oblige en effet à prendre de grandes inspirations. Et donc à inhaler les fameuses particules fines mauvaises pour la santé qui pénètrent profondément dans les poumons. Des chercheurs britanniques ont démontré que les personnes qui se déplaçaient en ville à vélo avaient 2,3 fois plus de carbone noir dans leurs poumons. On pourrait penser que l’argument santé-vélo tombe… Mais ce n’est pas le cas si on compare à la voiture. Une étude française de l’association Airparif pour mesurer le taux d’exposition à la pollution chez les cyclistes, avait équipé des triporteurs d’appareils mesurant le dioxyde d’azote et les particules fines toutes les dix secondes. Et les résultats étaient là aussi sans appel : le cycliste était entre 2 et 5 fois moins exposé que l’automobiliste à la pollution.

La voiture est donc un nid à pollution ?

Dr ED : Oui. Un habitacle sur 4 serait au-dessus de la limite acceptable pour le formaldéhyde, un puissant irritant des yeux et des voies respiratoires. Les jours de grande pollution, par exemple chez les grands asthmatiques, cela devient alors carrément dangereux…

 

Et les enfants en voiture ?

Dr ED : Le problème est identique, d’autant plus si on a affaire à des parents fumeurs. Fumer en voiture avec des enfants à l’arrière est criminel… car cela entraîne un taux de pollution par les particules fines trois fois supérieur au taux maximum préconisé par l’OMS et 10 fois plus important que celui constaté dans les trajets non-fumeurs. Cela signifie que fumer avec son enfant derrière, c’est comme lui faire faire le tour du périphérique, un jour d’embouteillage, à pied, en le tenant par la main… parce que l’on est prudent !

 

Et le métro dont on dit qu’il est plus écologique et plus sain que la voiture ?

Dr ED : Pour diminuer les embouteillages, peut-être. En revanche, l’air – selon l’Observatoire régional de santé de l’Île de France – y est 10 fois plus pollué qu’à l’extérieur. On n’est pas loin d’une promenade au bord du périphérique à pied !

 

Quels sont les conseils pratiques pour les inconditionnels de l’effort physique ?

Dr ED : Oui au vélo ou au jogging, à condition de ne pas aller trop vite, pour ne pas respirer trop goulûment, comme les joggeurs du soir ou du matin que l’on aperçoit sur les trottoirs.
Les arbres absorbent les particules fines environnantes, mais la pollution stagne autour de leurs feuillages. Il faut donc se méfier des parcs placés à côté de grands axes routiers. Le Champ-de-Mars par exemple. Aux bois de Boulogne ou de Vincennes, les espaces verts proches du périphérique font partie des cinq zones les plus polluées de Paris. Privilégiez les petites rues étroites où le trafic est plus rare, la pollution y stagnera par conséquent beaucoup moins.
Lorsqu’il pleut, le niveau de pollution chute. Courir ou rouler sous la pluie, même si ce n’est pas très agréable, diminue très fortement la pollution.
Et pensez que les salles de sport obtiennent le même résultat, car elles contiennent elles aussi de nombreux polluants, du formol notamment, sauf si elles ont une ventilation très efficiente.
Pour l’horaire, c’est entre 7 h 30 et 21 h que la pollution est la plus présente dans l’atmosphère. Il vaut donc mieux se dépenser très tôt ou en début de soirée pour bénéficier d’un air plus pur…