Selon une nouvelle analyse réalisée sur 11 grandes études prospectives sur des personnes en équilibre au plan thyroïdien, des taux de thyroxine libre (FT4) à la limite supérieure de la normale dans le sang sont associés à un risque accru de développer un trouble du rythme cardiaque invalidant, la fibrillation auriculaire. Parallèlement, dans la même étude, le taux TSH, qui est le test recommandé et généralement utilisé pour suivre une maladie de la thyroïde ou un traitement par L-thyroxine, n’est pas associé à une augmentation du risque de fibrillation auriculaire. C’est ce qui ressort d’une belle étude parue dans la revue Circulation.
Augmentation du risque de 45%
Les chercheurs ont examiné les données individuelles de 30 085 personnes, âgées de 40 ans ou plus, dans 11 études de cohorte. Parmi ceux-ci, 1958 (6,5%) ont une hypothyroïdie infraclinique à l’inclusion et 2574 (8,6%) développent une fibrillation auriculaire (suivi de 278 955 années-personnes).
La plage de référence pour la TSH était de 0,45-4,49 mUI / L et elle était basée sur les seuils spécifiques à l'étude pour la thyroxine libre (FT4). Si l’on divise la plage des taux normaux de thyroxine libre en 4 catégories (« quartiles »), par rapport au quartile inférieur dans la fourchette normale du FT4, le risque de fibrillation auriculaire augmente de 17% dans le deuxième quartile (hazard ratio 1,17, IC 95% 1,02-1,35), de 25% dans le troisième quartile (HR 1,25, IC 95% 1,09-1,43) et de 45% dans le quartile supérieur (HR 1,45, IC à 95% 1,26-1,66), y compris après ajustement pour l'âge et le sexe. Des résultats qui ont été confirmés dans les analyses statistiques complémentaires.
Risque chez les personnes traitées par L-thyroxine
Chez les 1146 patients traités par L-thyroxine, l'augmentation des taux de thyroxine libre à la limite supérieure de la normale est associée à un risque de fibrillation auriculaire plus élevé, alors que la plupart de ces personnes ont un taux de thyroxine libre dans le quartile le plus élevé.
Cependant, leur nombre relativement faible empêche une interprétation parfaite du risque de fibrillation auriculaire chez les patients sous L-thyroxine, l'un des médicaments les plus fréquemment prescrit.
Aucune association n’est objectivée dans les analyses ajustées selon l'âge et le sexe entre le risque de fibrillation atriale et les niveaux de TSH dans la fourchette de référence pour la normale ou pour l'hypothyroïdie infraclinique.
La thyroxine-libre plus pertinente que la TSH
Ce qui est nouveau dans cette étude, c'est que c'est la thyroxine-libre, ou free-T4 (FT4), et non la TSH, qui dicterait le risque de fibrillation auriculaire chez des personnes surveillées pour une affection thyroïdienne ou pour un traitement par L-thyroxine. Des résultats qui sont concordant avec les données de deux études récentes sur le même type de population, y compris l'étude de Rotterdam montrant un risque accru de fibrillation atriale avec des niveaux de thyroxine libre à la limite supérieure, en particulier chez les personnes de moins de 65 ans. Mais pour le moment il n’est pas possible de recommander cette mesure car nous ne savons pas encore ce que nous pouvons faire pour réduire le risque de fibrillation auriculaire dans cette population.
D’après les auteurs, la TSH serait en réalité plus un marqueur des effets hypophysaires de la fonction thyroïdienne, alors que la thyroxine-libre, qui est convertie en triiodothyronine, serait plutôt un effecteur avec une action directe sur les organes-cibles, dont le cœur. La thyroxine-libre a donc une fonction probablement plus directe sur le cœur que la TSH, ce qui expliquerait cette association entre le taux de thyroxine et la fibrillation auriculaire.