Perdre un proche est une expérience que chacun est amené à vivre un jour. Le deuil qui l’accompagne est, lui, individuel. La manière dont on l’endure dépend de notre santé physique, mentale et psychologique. Chez les personnes les plus fragiles ou les plus traumatisées, le deuil peut devenir une maladie, qui s’accompagne de réels symptômes. On parle alors de deuil pathologique. Mais comment savoir si je vis un deuil « normal » ou si je suis malade ?
Qu’est-ce que le deuil ?
Selon la définition du dictionnaire Larousse, le deuil est la douleur éprouvée à la suite du décès de quelqu’un. Il désigne aussi le processus psychique vécu à la perte d’une personne que l’on aime.
Au XXème siècle, c’est le psychanalyste Sigmund Freud qui introduit la notion de « travail de deuil ». Pour lui, le deuil ne s’applique pas uniquement à la perte d’une personne mais aussi d’un animal, d’un objet, voire d’un idéal. Toute disparition peut mener à un travail de deuil. Ce dernier est en plusieurs phases, jusqu’à celle, libératrice, de la fin du deuil : la reconstruction.
Généralement on considère le processus de deuil en cinq phases : le refus, la colère, la dépression, la régression et l’acceptation.
Des moments de deuil peuvent évidemment resurgir parfois. Notamment lors de dates-anniversaires, de fêtes. Nous savons bien que, face à la disparition d’un être cher, nous ne vivons pas le deuil de la même manière. Le deuil peut être plus ou moins long, s’accompagner de plus ou moins de larmes, de rage. Voire de tristesse. Mais cela est normal.
Le deuil compliqué, ou la lente reconstruction
On parle de deuil compliqué quand celui-ci s’étire particulièrement dans le temps et quand il s’accompagne aussi d’une souffrance très forte.
Souvent, les personnes qui vivent un deuil compliqué sont celles qui ont aussi beaucoup de mal à accepter la disparition de leur proche, celles qui sont dans un déni profond. Le travail de deuil commence alors beaucoup plus tard. Le deuil compliqué peut aussi s’accompagner d’une période de dépression chronique.
En d’autres mots, le deuil compliqué est vécu de manière plus forte et plus longue. Mais on ne parle pas de pathologie, de trouble mental.
Pourtant, deux organisations ont récemment pris des mesures pour faire entrer le deuil compliqué dans le classement officiel des maladies. Il s’agit de l’American Psychiatric Association, à travers son manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour sa classification internationale des maladies (ICD).
Dans un éditorial publié dans la revue du British Journal of Psychiatry du mois d’octobre, deux chercheurs, Paul K. Maciejewski et Holly G. Prigerson, s’opposent à cette idée. Il serait dangereux de considérer le deuil dit compliqué comme une pathologie mentale. Pour la simple et bonne raison que cela mènerait à un sur-diagnostic de la pathologie. Des personnes qui ont les symptômes «normaux » d’un deuil seraient considérées comme malades.
Traumatisme, culpabilité, maladie : le deuil pathologique
En réalité, le deuil pathologique n’est pas une maladie en soi. C’est plutôt le fait de contracter une maladie, inexistante jusque-là qui est pathologique. Quand la perte entraine le développement d’une maladie, mentale ou physique. La personne endeuillée peut alors souffrir de dépression, de troubles anxieux, voire de délires ou d’hallucinations. Mais elle peut aussi contracter des ulcères, des difficultés cardiaques ou des cancers. La personne endeuillée peut aussi développer des addictions, à l’alcool ou à la drogue.
Bien souvent, le deuil devient pathologique quand la personne avait un lien très fort avec le défunt. Ou quand elle a un puissant sentiment de culpabilité. Culpabilité d’être encore vivant ou conviction d’être responsable de la mort du proche. Le contexte du décès joue aussi un rôle. Si la mort est brutale. Un meurtre, un accident ou un suicide par exemple. Le traumatisme peut être énorme.
Quand un deuil pathologique est diagnostiqué, le corps médical intervient de deux manières : l’accompagnement psychologique et la prescription d’antidépresseurs ou d’anxiolytiques adaptés.