Dernièrement, lors d'une conférence de presse à Vienne, le Dr Sergio Canavero a affirmé avoir réussi une greffe de la tête entre 2 cadavres. L'opération, effectuée en Chine, est selon lui, un préambule à la greffe de la tête d'un volontaire vivant, toujours prévue en décembre.Toutefois la technique sur un homme mort ne permet pas de vérifier que la greffe sera efficace. Acte insensé ou escroquerie intellectuelle, dans l'état actuel de nos connaissances, cette greffe a peu de chance de faire remarcher un paraplégique.
Faux espoir pour les grands paralysés
Un italien, le Dr Sergio Canavero affirme qu'il va reproduire avant Noël sur l'homme, ce qu’un Américain, le Dr Robert White, avait déjà réussi dans les années 70 sur des singes. Le premier singe transplanté n’avait survécu que quelques jours, mais ces opérations furent ensuite perfectionnées, jusqu'au point où une tête greffée pouvait survivre indéfiniment sur un nouveau corps... paralysé.
S'inspirant de ce modèle, le chirurgien italien estime que la transplantation de tête sur un corps sain, appliquée aux humains, pourrait sauver de nombreux patients atteints de maladies n'affectant pas la tête, des tétraplégiques (paralysés des quatre membres) ou encore tous ceux atteints d’une maladie mortelle qui ne touche pas le cerveau. « C'est parfois l'espoir qui nourrit le désespoir ».
Une désapprobation médicale unanime
Les neurochirurgiens jugent avec sévérité l’effet d’annonce du chercheur italien. Canavero vient ici relayer un vieux rêve, mais il n'apporte aucune avancée qui nous en rapproche. S'agissant du donneur du corps, il devra être dans un état de mort cérébrale, mais avoir un corps en bon état. Pour le receveur, c'est l'inverse.
Canavero décrit l’intervention en détail : « La tête du receveur sera refroidie. On la collera sur le corps du donneur, on reconnectera la moelle et les différents tissus. Si le patient survit à l'opération, il faudra ensuite qu'il entame une longue convalescence, pour s'adapter à son nouveau corps et réapprendre à bouger ». Sur les éventuels problèmes auxquels il pourrait se voir confronté, le médecin a, là encore, réponse à tout. « La partie la plus difficile est de reconstituer la continuité de la moelle épinière, ce détail est maintenant réglé grâce à l'utilisation de matériaux chimiques, qui permettent de rétablir les liens entre les fibres nerveuses ». Mais c'est là où le bas blesse, si l'on sait reconnecter des nerfs avec de bonne chance de succès, il n'en est rien pour la moelle.
Beaucoup de théorie
Relier des vaisseaux n’est pas bien compliqué, en revanche, coller les moelles épinières reste pour l'heure totalement infaisable. Dans les nerfs, les fibres nerveuses sont conduites par des gaines de protection qui leur servent de guide. Or, dans la moelle, il n'y a pas de gaine de protection, et même correctement recollée, il n'y a pratiquement aucune chance pour que les fibres nerveuses repoussent pour aller se reconnecter avec les différents muscles.
En théorie, en mettant deux extrémités de nerfs dans une solution composée de deux polymères, le polyéthylène glycol et le chitosane, il est possible de faire fusionner des cellules nerveuses. Cela n'a jamais été réalisé avec succès chez l'humain, ni chez le moindre animal.
Raccorder toutes les fibres à la main
On a beau disposer des meilleures colles biologiques, des facteurs de croissance les plus performants pour faire repousser les cellules, ou savoir reconnecter avec beaucoup de patience et de minutie les extrémités d’un nerf, dans cette intervention, il faudrait le faire des millions de fois… Même si, comme l'auteur le laisse entendre, 10 % seulement des voies descendantes suffisent à assurer une fonction motrice acceptable pour le nouveau corps, 10 % de millions de nerfs, cela implique de réaliser, pour des milliers de cellules nerveuses, un alignement parfait à la main. Ce que l’on ne sait pas faire… Pas avant bien longtemps !
Ses seules difficultés seraient matérielles, estime le Dr Canavero : sur cet aspect, avec un coût total estimé de dix millions d’euros, il a probablement raison. Mais 10 millions pour transformer un paraplégique en chimère paraplégique...