Le grand spécialiste de l'adolescence, le professeur Philippe Jeammet, dans son livre, "L'adolescence", aux éditions Solar, parle quant aux sectes de "forme la plus pervertie de l'éducation". Eduquer un enfant, c'est prendre en compte son originalité, son unicité, ce qui n'est pas le cas des groupes extrémistes qui préfèrent plutôt pratiquer une forme de "clonage intellectuel" dont le but est de produire - souvent au nom d'un leader charismatique - un modèle unique de penser et de conduite. Eduquer, c'est donner les outils nécessaires pour pouvoir apprendre le plaisir et la curiosité pour savoir critiquer et être en mesure de faire des choix. La perversion, c'est utiliser le faible - soit personnalité faible ou enfant en position de faiblesse - à des fins personnelles, lui refuser le droit d'exister avec ses besoins et ses désirs propres.
Toutefois, comment expliquer que dans certaines familles supposées normales, il y ait parfois un membre qui échappe au schéma éducatif pour rejoindre des groupes aux idéologies douteuses. Tout adolescent ne peut être totalement protégé du hasard des rencontres et des événements. Pourtant, heureusement, très peu passent à l'acte. Pour cela, il faut deux conditions. La première, et les parents n'ont que peu de moyens de lutter contre, si ce n'est en ayant anticipé la discussion, est la personnalité charismatique d'un pseudo leader qui saura trouver les mots qui font mouche. La seconde est un traumatisme, une humiliation pouvant, toujours selon le professeur Jeammet, conduire un individu à fusionner avec une cause, sans la rencontre de laquelle il se serait peut-être suicidé. Les personnes victimes de ce genre de blessure - qui sont des blessures d'amour propre - se réfugient souvent dans un orgueil démesuré qu'il paraît plus acceptable de déléguer à une cause que de l'assumer soi-même.
Les dérives sectaires sont heureusement rares, suffisamment pour que les parents n'aient pas vraiment à les craindre. Mais les blessures des adolescents les plus susceptibles d'entrer dans une secte n'étant pas toujours les plus visibles, c'est encore une raison supplémentaire pour rappeler que l'adolescence est une période extrêmement délicate de la vie humaine qui nécessite plus que jamais avec ses propres enfants observation, doigté et communication.