La classification internationale des maladies de l'OMS ne sera publiée qu'en juin, mais il semble que l’addiction aux jeux vidéo, c’est-à-dire le « jeu en ligne pathologique », y fasse une entrée fracassante. C’est ce qu’a annoncé un porte-parole de l’instance, vendredi 5 janvier à Genève. Près d’1 millions de Françaises et Français en souffriraient.
Comme pour toutes les addictions, c’est la perte de contrôle et la poursuite du comportement malgré les conséquences négatives pour le personne qui doivent alerter. Car le jeu, c’est d’abord un loisir, donc une activité utile à l’équilibre social et psychologique. Pourtant, certains passent du « jeu social récréatif », au « jeu excessif » avec les premières pertes de contrôle, puis au jeu véritablement « pathologique ». Et là, on comprend bien, que la vie devient impossible.
Les jeux vidéo ont aussi un impact positif
Pour une grande majorité des joueurs, les jeux vidéo restent récréatifs et utiles : ils augmentent la taille et l’efficacité de zones du cerveau associées aux capacités visio-spatiales, qui permettent par exemple de s’orienter dans l’espace, de percevoir les objets de l’environnement ou encore d’imaginer un objet physiquement absent. Et ce n’est pas seulement chez les « gamers » chevronnés : ces modifications s’observent même des volontaires qui ont suivi un programme d’entraînement de quelques semaines.
Sur le plan fonctionnel, les jeux vidéos développent en particulier l’attention soutenue et l’attention sélective. Les joueurs sont donc plus vigilants, et meilleurs pour isoler une action de l’environnement, comme écouter une conversation sans se laisser distraire. Tous ces bénéfices sont mis à profit pour rééduquer certain malades (AVC, Alzheimer débutant….).
Comment devient-on addict aux jeux vidéos ?
Ces bénéfices structurels et fonctionnels sont réels, mais ils ont une contrepartie : les jeux vidéo peuvent être addictifs.
En agissant sur le circuit de la récompense du cerveau, ils exposent certains joueurs à des envies irrépressibles, comme c’est le cas pour d’autres désordres addictifs.
Ces envies s’expliquent par un dérèglement progressif de la dopamine et de la sécrétion d’hormones du plaisir comme les endorphines. Des substances proches de la morphine que sécrètent par exemple les coureurs de fond pour moins souffrir et qui les rendent accros aux kilomètres. Même si l’addiction au jeu est moins rapide qu’avec des drogues dures, tout comme pour l’addiction au sport, c’est la répétition du comportement malgré les conséquences négatives qui confirme l’entrée dans la maladie.
Comment définir le jeu en ligne pathologique ?
Le jeu en ligne pathologique, tout comme les autres dépendances comportementales, se manifeste d’abord par un jeu persistant et fréquent, avec une perte de contrôle qui se traduit par des difficultés de plus en plus importantes à s’arrêter, travailler, avoir d’autres loisirs, voir ses amis ou sa famille.
Le joueur pathologique donne progressivement une priorité au jeu, au point d’envahir ses pensées et son quotidien au détriment parfois des besoins les plus fondamentaux comme manger, dormir ou se laver.
Cette définition sert de ligne directrice à l’OMS dans sa classification de la nouvelle pathologie qu’est « le jeu en ligne pathologique » (Internet Gaming Disorder). C’est l’effondrement du contrôle exécutif frontal, responsable de nos choix et de nos décisions, combiné au dérèglement du système de la récompense à l’origine des envies irrépressibles et du manque, qui sont le dénominateur commun à toutes les théories scientifiques sur les addictions.
Heureusement cette addiction se traite. C’est le travail de psychiatres et d’addictologues spécialisés, exerçant dans les CSAPA (Centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie) ou les services spécialisés de certains hôpitaux. Il faut savoir que le joueur en ligne pathologique demande de l’aide tardivement, bien souvent à la phase de désespoir. Cette classification permettra de faire le diagnostic plus tôt et de l’aider avant les conséquences personnelles professionnelle et familiales dramatiques.