La Haute Autorité de Santé (HAS) et le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) ont publié de nouvelles recommandations visant à améliorer le diagnostic d’endométriose et clarifier les stratégies de traitement de cette maladie invalidante qui toucherait plus d’une femme sur dix entre 16 et 50 ans et entraînerait dans 25 à 50 % des cas une infertilité.
Des recommandations bienvenues pour une maladie fréquente aussi mal soignée comme en témoignait il y a peu de temps Enora Malagré. La chroniqueuse de Touche pas à mon poste avait confié, dans une interview au journal Paris Match, avoir décidé de se faire retirer l'utérus en raison d'une endométriose qui lui a provoqué de nombreuses souffrances et plusieurs fausses-couches.
Mieux traiter les malades
Ces recommandation étaient très attendues car les précédentes dataient d’il y a 12 ans, or de nombreux progrès médicaux et chirurgicaux ont vu le jour, progrès qui peuvent rester inutiles pour beaucoup de femmes car le délai diagnostique reste trop long : en moyenne, il dépasse aujourd’hui 7 ans !
Or, ce long délai diagnostique, en plus des souffrances qu’il inflige inutilement aux malades, est responsable de nombreuses complications, dont les douleurs lors des règles, les douleurs lors des rapports sexuels et les troubles de la fertilité.
Ainsi, 35% à 50% des femmes qui ont des douleurs du bassin au moment des règles et au moins 50% des femmes qui sont touchées par l’infertilité souffrent d’endométriose.
Une maladie mal connue
L’endométriose est une maladie gynécologique à l’origine de douleurs du ventre et du bassin au moment des règles qui reste très mal connue. Il s’agit d’une migration anormale de cellules de l’endomètre en dehors de l’utérus. L’endomètre est le tissu qui revêt la paroi interne de l’utérus. L’endomètre est hypertrophié en première partie de cycle pour assurer la nidification de l’embryon éventuel, puis il est éliminé au moment des règles. L’endométriose est provoquée par le développement puis l’involution de ce tissu endométrial qui s’est développé ailleurs que dans l’utérus, et en général dans le petit bassin et le ventre.
Quand penser à une endométriose ?
Plutôt que d’attribuer des règles douloureuses à un « simple déséquilibre hormonal qui va passer », une douleur importante au moment des règles, surtout si elle constitue un handicap social ou professionnel, doit conduire une adolescente ou une femme à en parler à son médecin.
De même, si des douleurs surviennent au moment des rapports sexuels et si celles-ci perdurent, il est important de consulter ? C’est la même chose en cas de problème de stérilité chez une femme jeune.
D’autres douleurs ou signes plus « régionaux » peuvent alerter : difficultés et douleurs pour uriner, traces de sang dans les urines ou les selles, douleurs du bassin lors des émissions de selles…
Quelle stratégie diagnostique conseillée ?
Le diagnostic repose en premier sur l’interrogatoire du médecin et celui-ci sera orienté en fonction des plaintes. Il sera complété par un examen clinique complet et une échographie du petit bassin.
En cas de discordance entre les plaintes et les examens, d’autres examens plus spécialisés peuvent être réalisés (échographie endovaginale ou IRM), et c’est seulement en l’absence de lésion caractéristique qu’une cœlioscopie diagnostique, plus invasive, doit être envisagée.
En cas de diagnostic, et avant toute chirurgie, il faut évaluer l’extension de la maladie avec des examens qui vont explorer la vessie et les intestins.
Un traitement individualisé
L’objectif principal doit être de soulager les douleurs et le traitement repose donc en priorité sur une contraception œstroprogestative ou un stérilet libérant un progestatif, le lévonorgestrel.
Les médicaments qui bloquent les cycles hormonaux, comme les agonistes de la Gn-RH, sont indiqués en 2e intention et en association à un progestatif et à un estrogène. Une alternative est une contraception à base de progestatifs selon différentes modalités.
De nouveaux traitements de l’endométriose comme les anti-aromatases, ne sont pas recommandés en l’absence d’évaluation solide.
La chirurgie est envisagée après échec des traitements médicaux, en fonction des souffrances de la malade et en cas de désir de grossesse. Il est important de prévoir un traitement hormonal en continu en post-opératoire afin de limiter le risque de récidive et d’améliorer la qualité de vie. Les agonistes de la Gn-RH ne sont pas recommandés en post-opératoire.
Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (ibuprofène, ...) ne sont pas non plus recommandés sur le long terme, en raison des complications qu'ils peuvent faire courir.
Une prise en charge dans des centres experts
Les auteurs des recommandations soulignent la difficulté à trouver des études scientifiques de bonne qualité pour établir les recommandations. La prise en charge devrait donc être réalisée dans des centres associant plusieurs type de médecins (gynécologues et radiologues) et de chirurgiens (gynécologues, urologues, digestifs) afin de réaliser une vraie prise en charge « pluridisciplinaire ».
Afin d’améliorer la prise en charge des cas difficiles, il convient également de prévoir des centres experts de dépistage précoce de l’endométriose.
Très attendues, ces recommandations représentent une base solide pour améliorer la prise en charge de l’endométriose, ce « cancer métastasé sans cellules cancéreuses ».